Un hymne au chant urbain – Le Jeune Indépendant
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Culture

Un hymne au chant urbain

Un hymne au chant urbain

Six voix féminines, accompagnées d’un orchestre de six musiciens, sont accueillies, ce dimanche 8 mars, dès 15h, à la salle Ibn Khaldoun à Alger, pour un récital de chant chaâbi.

Au lendemain de leur spectacle sur la scène de l’Institut du monde arabe à Paris, les Chaâbiates (les filles du chaâbi) débarquent enfin aux portes de la Casbah d’Alger. Le concert Châabi au féminin constitue une première en Algérie.

Les six voix féminines vont célébrer la Journée internationale de la femme, mais aussi le chant urbain algérois. Elles viennent de Paris où elles se sont réunies autour de Mourad Achour, ce présentateur culturel à la radio qui a initié cette aventure en mai 2013.

Ce dernier explique avoir créé « un spectacle musical rendant hommage aux maîtres du chaâbi ». Après avoir fait appel à Malya, la fille de l’artiste H’ssicen Saadi, qui s’inscrit plutôt dans un chaâbi fusionné avec des musiques du monde que nous apprécierons dans son premier album Ya B’har, le groupe est constitué.

Ce qui représente une exception dans l’histoire du genre et dans le paysage scénique. Peu de chanteuses comme Nardjess, Nadia Benyoucef ou Fella Ababsa ont expérimenté occasionnellement l’art de M’hamed El Anka. Aucun nom féminin ne s’est lancé dans une carrière dans ce genre.

Et même la caractéristique masculine de ce chant se révèle par la note Do (l’octave grave), à l’exception de quelques chanteurs comme El Hadj Mrizek ou Abdelkader Chercham. Avec Chaâbi au féminin, une nouvelle vocalité est apportée. L’innovation réside certainement dans la démonstration que ce genre populaire n’est pas l’apanage des hommes.

Il est alors question de renouvellement, sans dénaturer l’esthétique, l’étique et le fond. Pour Noureddine Aliane, le chef d’orchestre : « Déjà, pour donner la parole aux femmes, on va commencer à faire du chaâbi d’origine. Apporter une touche moderne au chaâbi n’est pas interdit. Chacun vit son époque.

En tout cas, quand la voix est féminine dans le châabi, il vaut mieux commencer par l’esthétique originelle ». Il reste à parfaire l’équilibre entre les différentes timbres et octaves. Et certaines voix doivent aller vers plus de consistance.

Ces six personnalités, issues pour la plupart de l’école musicale andalouse, ne se présentent ni comme une chorale ni comme un orchestre traditionnel féminin – m’samaâ. Elles rappellent effectivement l’histoire de ce genre en reprenant des textes de maîtres et de poètes comme les regrettés Mustapha Toumi et Mahboub Bati. Elles chantent, selon chaque titre, en chœur, en duo, en trio ou en solo.

L’une des difficultés, sinon l’originalité, est d’avoir repris par Hassina Smail un texte de Mahboub Bati : Djhalt koul sahbi ou khfit s’rari : interprété par Amar Ezzahi (1968). En raison de son rythme, il n’est pas aisé de reprendre cette chanson que seuls les mélomanes connaissent. Les six Chaâbiates présentent des chansons si populaires qu’elles relèvent le défi d’asseoir une nouvelle tradition avec une dimension de douceur et d’énergie collective.

Elles ont cette audace de reprendre délicatement Sobhan allah ya l’tif – poème de Mustapha Toumi que El Anka a ancré dans la mémoire collective – que Malya a introduit dans son album ; Lahmam du même maître ; El qahoua oua latey de Mrizek, Allo allo ou El bareh d’El Hachemi Guerrouabi. Un répertoire fait de qsid comme Yamna notamment qui rafraichit un tant soit peu la mémoire et revivifie la passion du blues algérois.

Et dans cet état d’esprit, le spectacle Chaâbi au féminin sera entamé, chaque fois sur scène, par l’hymne Ahna Chaâbiates, écrit par Nacer Fertas, dans lequel les six interprètes affirment que cet art les a réunies pour le partager avec le grand public.

Apparemment, Malya en voulait encore plus. Pour elle, ce concert « est passé trop vite, je n’ai pas eu le temps d’apprécier, mais je pense que le public a pris du plaisir et nous aussi ». Dommage que le son de la régie de la salle n’est pas à la hauteur d’une telle performance.

Au chant : Syrine Benmoussa de Tunisie, Hind Abdellali de Mostaganem, Amina Karadja de Tlemcen, Malya Saadi, Hassina Smail et Nacera Mesbah d’Alger. 

L’orchestre sous la direction de Noureddine Aliane au mandole, Kahina Afzim au qanoun, Yazid Touahria au banjo, Mokrane Adlani au violon, Nacer Fertas au tar, Nasser Haoua à la derbouka.

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