Tizi Ouzou : Débat autour de la musicothérapie
La musique peut-elle constituer un remède contre certaines maladies mentales ? « La réponse est oui », a estimé le Dr Mouloud Ounnoughène, neurochirurgien à l’issue d’une conférence qu’il a animée, jeudi dernier, dans l’espace du Petit Théâtre de la maison de la Culture Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou. Une conférence ayant pour thème « La musique autrement, de la note à la thérapie ».
Le conférencier s’est d’abord penché sur le volet historique de la thérapie musicale, avant d’expliquer scientifiquement le fonctionnement du cerveau humain dont l’exploration de tous les éléments fonctionnels jouant un rôle déterminant dans la conduite de l’homme est encore loin de révéler tous ses secrets.
Sur le volet historique, le Dr Mouloud Ounnoughène a souligné que dans la Grèce antique, les scientifiques et intellectuels avaient des convictions quant aux vertus thérapeutiques de la musique. Plus tard, avec l’avènement islamique, des savants musulmans ont aussi mené des travaux de recherche sur la vertu thérapeutique de la musique dans les cas de maladie mentale.
Al Farabi (872-950), qui était théoricien et interprète de musique, a mis en évidence, dans son ouvrage le Grand Livre de la musique, les bienfaits de la musique sur le mental.
Le savant persan Hinadou (954-1019), poète et médecin, a plaidé pour que la musique fasse partie de la formation du médecin, au même titre que les mathématiques, l’astronomie et la physique. Ibn Sina (980-1037) et Dazi (868-921), pour ne citer que ces savants dans le monde musulman, ont su mettre en corrélation intime l’écoute de la musique par le patient et son traitement.
Le Dr Mouloud Ounnoughène a aussi affirmé qu’un fœtus de cinq mois, c’est-à-dire quand l’enfant est encore dans le ventre de sa mère, peut ressentir une émotion par le biais musical.
Le conférencier, grand adepte de piano, selon Youcef Merahi, participant à ce rendez-vous en tant que modérateur, a écrit dans sa brochure que « Platon à El Farabi, en passant par Al Urmawi, la musique a longtemps été utilisée à des fins thérapeutiques. Que ce soient les modes musicaux de la Grèce antique, les maqâms, les noubas ou encore les autres suites mélodiques, tous font sourdre un état d’âme.
La musique est douée d’une puissance immanente et présente une compétence cognitive qui mobilise plusieurs régions de notre cerveau. Cet art est susceptible de « remodeler » notre cortex en modifiant ses connexions nerveuses (neuroplasticité). La musique est un appoint intéressant qui accompagne, entre autres, l’orthophoniste dans la rééducation d’un trouble de langage après un AVC (accident cardiovasculaire). C’est un adjuvant intéressant dans le protocole de soins de l’Alzheimer. Cet art se révèle être également d’une aide appréciable chez l’enfant autiste. Ecouter de la musique ou, mieux encore, jouer régulièrement d’un instrument de musique ou pratiquer une activité impliquant le chant est fort intéressant pour notre santé mentale ».
A la question de savoir si l’histoire a retenu que certaines personnalités évoluant dans le monde musical ont sombré dans la folie, le Dr Mouloud Ounnoughène a reconnu qu’il arrive que même les gens de la musique subissent une dépression nerveuse. « Toutefois, leur mal ne dure pas », a-t-il indiqué.
A la question de savoir si un tel thème peut faire l’objet d’un colloque national ou même international, le conférencier a répondu qu’il serait très heureux d’y participer. C’est Mme Nabila Gouméziane, en sa qualité de directrice de la culture et des arts, qui a fait savoir, en aparté au Jeune Indépendant, que ses services sont déjà à pied d’œuvre dans la préparation de ce rendez-vous scientifique. « Le colloque sera national mais la date exacte de sa tenue n’est pas encore fixée », a indiqué la première responsable de la direction de la culture et des arts de la wilaya de Tizi Ouzou.