Tensions dans le Donbass: Le nouveau grand Jeu de Biden
Que se passe-t-il dans la région du Donbass ? Le regain de tension perceptible sur le terrain augure d’un nouveau cycle de froid diplomatique entre la Russie et les Occidentaux (Etats-Unis, Union européenne). D’ailleurs, les mises en garde fusent des capitales européennes en direction de la Russie, et les Américains ont déplacé deux bâtiments de guerre de la Méditerranée vers la Mer Noire. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a multiplié les déclarations nationalistes et pro-occidentales, comme pour donner le ton aux radicaux ukrainiens et à ses partenaires occidentaux auprès desquels il espère un soutien indéfectible. Et c’est justement ce soutien indéfectible qui lui a été promis par le président américain Joe Biden. Le nouveau locataire de la Maison Blanche affiche une posture belliqueuse claire contre Moscou.
En effet, la Maison blanche a rendu public ce mardi les grandes lignes de la conversation téléphonique entre Biden et son homologue russe Vladimir Poutine. Selon la présidence américaine, Joe Biden a demandé à Poutine de «faire baisser les tensions». Le message est clair, Washington considère Moscou comme le principal accusé dans l’escalade de la situation en Ukraine. Le président américain a également «souligné le soutien inébranlable des Etats-Unis à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine», a indiqué la Maison Blanche.
Et il semblerait que l’Ukraine revient au centre des tractations euro-atlantiques, d’où la question légitime : à qui profite le crime. Logiquement pas à la Russie qui verra son voisin de l’Ouest basculer davantage, et contre les intérêts russes, dans le giron atlantique. D’ailleurs, des consultations d’urgence ont eu lieu hier mardi à Berlin puis à l’Otan.
Washington a annoncé une première mesure avec l’envoi «dès cet automne» de 500 militaires supplémentaires en Allemagne, par la voix du secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin, après une réunion à Berlin avec son homologue allemande Annegret Kramp-Karrenbauer. Le ministère turc des Affaires étrangères a rapporté ce 9 avril avoir été informé par les Etats-Unis que deux navires de guerre américains allaient être déployés en mer Noire jusqu’au 4 mai. «Une notice nous a été envoyée il y a 15 jours par voie diplomatique selon laquelle deux navires de guerre vont rejoindre la mer Noire», a expliqué Ankara, dans des propos rapportés par Reuters. En vertu de la Convention de Montreux, la Turquie doit être avertie du passage de navires étrangers par le détroit du Bosphore.
Washington mobilise l’UE et l’Otan
«Le renforcement militaire considérable de la Russie est injustifié, inexplicable et profondément préoccupant», a averti de son côté le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, après avoir reçu à Bruxelles le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kuleba. Ce dernier, qui s’est également entretenu avec son homologue américain Antony Blinken, a exhorté les Occidentaux à «décourager Moscou de toute nouvelle escalade, notamment en faisant comprendre que le coût de toute nouvelle aventure militaire serait trop élevé».
De son côté, le secrétaire d’Etat américain s’est entretenu avec son homologue allemand. «Le secrétaire d’État Antony J. Blinken et le ministre allemand des Affaires étrangères Heiko Maas ont souligné l’importance de soutenir l’Ukraine contre les provocations unilatérales russes (sic) le long de la ligne de contact dans l’est de l’Ukraine, en Crimée occupée et le long des frontières de l’Ukraine», a noté le Département d’État dans un communiqué. Les parties ont également souligné la nécessité pour la Russie de cesser immédiatement son renforcement militaire et sa rhétorique provocatrice.
Le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian a également évoqué le 9 avril 2021 la situation de l’Ukraine dans des appels téléphoniques avec le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba, le secrétaire d’État américain et le ministre allemand des Affaires étrangères.
«J’ai souligné dans le cadre de ces échanges la vive préoccupation et la grande vigilance de la France à l’égard des récents mouvements significatifs de forces militaires russes intervenues à proximité de la frontière à l’Est de l’Ukraine ainsi qu’en Crimée. La France considère important et urgent que la Russie puisse apporter de manière transparente, notamment par les mécanismes prévus à l’OSCE, des clarifications sur le cadre et les motivations de ces mouvements. Nous appelons la Russie à cesser ses provocations et à prendre sans délai les initiatives nécessaires pour engager la désescalade», a déclaré le Quai d’Orsay.
Ça n’arrange pas les affaires de Moscou
Quid de la position de Moscou ? Les Russes prendront-ils le risque de rapprocher davantage l’Otan de leurs frontières ? Pas si sûr. «Le Kremlin craint que la guerre civile reprenne en Ukraine», a déclaré vendredi denier Dmitri Peskov, le porte-parole de Vladimir Poutine.
Ce dernier a même précisé que les mouvements de troupes russes actuels ne posaient «aucune menace pour personne», les imputant à une «activité croissante des forces armées des pays membres de l’OTAN» le long de la frontière de la Russie.
Tout en rappelant ce 2 avril qu’il ne souhaitait pas une reprise de la guerre civile en Ukraine, Moscou a demandé à Kiev et aux Occidentaux de ne pas «s’inquiéter» des mouvements de ses troupes sur le territoire russe à proximité de la frontière ukrainienne. La veille, le président ukrainien avait mis en garde contre le risque de «provocations» russes dans l’est du pays.
Interrogé par l’agence de presse ukrainienne UNIAN à propos d’un renforcement de la présence militaire russe près de la frontière avec l’Ukraine, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a répondu en ces termes : «La Russie effectue le transfert de ses forces armées à l’intérieur de son territoire comme elle l’entend. Cela ne doit inquiéter personne, cela ne pose aucune menace pour personne. La Fédération de Russie prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de ses frontières. Vous savez qu’une activité croissante des forces armées de pays membres de l’OTAN, d’autres alliances et de pays indépendants est constatée le long de la frontière de la Russie. Tout cela nous oblige à être sur nos gardes.»
Etre sur ses gardes, voilà ce qui semble être le leitmotiv du Kremlin, d’autant plus que la nouvelle administration américaine veut selon toute vraisemblance en découdre avec la Russie après une trêve tacite teintée de Guerre froide entre l’ancien président Donald Trump et Vladimir Poutine. Le successeur démocrate de Trump n’a pas la même vision. Joe Biden, poussé par l’establishment de Washington et par le complexe militaro-industriel entendrait raviver le conflit du Donbass sans pour autant arriver à une conflagration générale.
La démarche américaine actuelle aurait pour objectif le renforcement du gouvernement ukrainien et l’approfondissement de la ligne de fracture entre Ukrainiens catholiques pro-occidentaux et Ukrainiens orthodoxes russophones. La finalité serait de pousser ce pays définitivement sous l’escarcelle euro-atlantique, Un cauchemar que Moscou ne veut en aucun cas endurer .