Tebboune lance la guerre contre les lettres anonymes
Le président de la République Abdelmadjid Tebboune est décidé à mener une guerre contre les propagateurs des lettres anonymes. Une semaine après sa rencontre avec les walis le 18 août dernier, le chef de l’État a adressé une instruction aux ministres et aux responsables des corps de sécurité afin qu’ils font l’impasse sur les lettres anonymes. C’est ce qu’a indiqué ce vendredi la présidence de la République dans un communiqué.
Pour le président de la République ces lettres anonymes ont un effet néfaste sur le bon fonctionnement des entreprises et des administrations, mettant un frein à l’esprit d’initiative chez les managers du secteur public.
«Des rapports parvenus à la présidence de la République font ressortir que certains cadres de l’État et responsables à différents niveaux ont fait l’objet de poursuites judiciaires, sur la base de simples lettres anonymes adressées aux différents services de sécurité et institutions de l’État. Nombre de cadres ont ainsi été privés de liberté sur la base de ces lettres qui, le plus souvent, se sont avérées dénuées de tout fondement », écrit le chef de l’État.
Tebboune, qui dénonce « l’injustice subie par ces derniers-sus-cités », affirme que cet « état de fait a entraîné une paralysie de l’activité des administrations et des entreprises publiques, à cause de la crainte, la peur et l’angoisse d’être poursuivi sur la base d’une simple lettre anonyme. », ajoutant que ces lettres anonymes au lieu d’être exploitées dans la lutte contre la corruption, ont fini par paralyser la machine économique.
« Alimenté par la rumeur, un climat de crainte et de suspicion s’est installé auprès d’autres responsables qui, par crainte d’éventuelles poursuites judiciaires, se limitent à un minimum d’obligations et ne développent aucun esprit d’entreprise. C’est ainsi que le traitement d’importants dossiers, revêtant parfois un caractère d’urgence, est renvoyé à des dates ultérieures, causant ainsi de graves préjudices au fonctionnement de ces institutions », développe le Président, dans son réquisitoire contre les lettres anonymes.
Dans son allocution lors de la deuxième rencontre Gouvernement-walis, il a instruit les magistrats locaux à ne plus tenir compte de ces lettres dans les poursuites judiciaires. Il a dressé un constat accablant de l’impact de ces dernières sur le fonctionnement des entreprises et des administrations, et donne des instructions quant à leur exploitation, dans le cadre de la lutte contre la corruption.
Sur ce chapitre, le président de la République assure que la lutte contre la corruption «ne doit, en aucun cas, prendre la forme d’une campagne de déstabilisation des outils de réalisation et de concrétisation des missions de l’État et de ses différentes structures d’exécution.», il estime que « ce climat malsain est naturellement alimenté par des rumeurs souvent distillées par les tenants de l’argent sale, des corrompus, ceux qui veulent à tout prix déstabiliser l’État et ses structures pour échapper à leur sort inéluctable. »
Dans cette circulaire, le président Tebboune détail le mode d’emploi pour l’exploitation des lettres anonymes, afin d’éviter des injustices et la paralysie des entreprises et des administrations. Il explique qu’il «ne faut pas systématiquement procéder à la destruction des lettres anonymes, mais qu’il faut agir sur la base de leurs contenus et faire la différence entre deux types d’actes.»
«Il y a les actes qui, bien que condamnables, ne tiennent qu’à l’incompétence ou à la mauvaise appréciation, qui sont démunis de tout esprit ou de volonté de corruption, passive ou active, et ne profitent pas à l’agent incompétent, ni directement, ni indirectement, ni à sa famille, ni à ses amis ou connaissances. Ces actes seront sévèrement sanctionnés administrativement. » Et « les actes ayant été à l’origine de pertes économiques ou financières à l’Etat dans le but d’accorder des avantages indus à des tiers, en infraction aux lois et règlements et sans consultation écrite de la hiérarchie », ajoute-t-il, en précisant que « dans ce cas, le doute est permis et l’investigation doit être orientée vers la recherche de preuves tangibles de corruption active ou passive. »
Enfin, le président de la République, demande au ministre de la Justice et aux responsables des services de sécurité, «de ne plus tenir compte, à l’avenir, des lettres de dénonciation anonymes, celles-ci ne pouvant en aucun cas constituer une preuve d’imputabilité de faits qualifiés de crime ou de délit. »