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Rationnement de l’eau : le calvaire des citoyens

Rationnement de l’eau :  le calvaire des citoyens

Le stress hydrique semble bel et bien planer sur l’Algérie. Des mesures de rationnement d’eau ont été engagées récemment par les autorités publiques, laissant la marge de manœuvre aux collectivités locales afin de gérer cette crise de pénurie d’eau. Des dispositions ont été mises en place en fonction des secteurs impliqués, considérés comme grands consommateurs d’eau.

A Alger, plusieurs communes subissent des perturbations en eau potable allant jusqu’à trois jours de coupure consécutifs. A Sour El-Ghozlane, au sud de la wilaya de Bouira, la population locale doit désormais prendre son mal en patience alors que les robinets sont à sec depuis 5 jours. Un vrai calvaire pour les ménages qui se sont habitués à une disponibilité de cet élément vital 24h/24. Par ailleurs, ces perturbations en alimentation en eau ont paralysé nombre d’activités commerciales et industrielles.

«Nous n’avons pas d’eau dans les robinets depuis 5 jours à Sour El-Ghozlane. Cette situation perdure depuis trois semaines déjà. Il paraît que des mesures ont été prises par les services de la wilaya de Bouira pour rationaliser la consommation d’eau», a indiqué hier au Jeune Indépendant Salima.

Ces coupures d’eau régulières ont poussé les citoyens à trouver des solutions, même si elles ne sont que provisoires, pour gérer leurs besoins quotidiens en eau potable.

«Nous avons été obligés de nous doter de grands jerricans et d’une citerne pour nous alimenter en eau. Chez nous, nous avons l’espace nécessaire pour le faire, mais cela n’est pas le cas d’autres ménages vu l’exiguïté des appartements. Il est quasiment impossible d’y avoir une citerne pour emmagasiner suffisamment d’eau. Cela rend le quotidien des citoyens invivable», a-t-elle précisé.

Le même constat a été mis en exergue par les habitants de la commune de Bouzaréah, sur les hauteurs d’Alger.

«Les quartiers de Bouzaréah et ses environs subissent des suspensions d’eau de manière différente. Si dans certains quartiers, la coupure se fait quelques heures par jour, ce qui permet aux ménages de gérer ce problème, d’autres cités restent sans eau pendent deux jours et passent des journées de calvaire, notamment en été où la consommation de l’eau augmente systématiquement», a déclaré au Jeune Indépendant Assma.

Les activités commerciales font les frais de ces nouvelles mesures

Les activités commerciales et industrielles sont parmi les secteurs les plus affectés par les nouvelles mesures de distribution d’eau prises juste après les dernières élections législatives. Les services de la wilaya d’Alger ont, dans ce sens, porté à la connaissance des gérants des stations de lavage qu’ils sont dorénavant soumis à un programme précis pour exercer leur activité. Ils peuvent ainsi opérer quatre jours par semaine (vendredi, samedi, lundi et mercredi, de 8 h à 14 h, et ce à partir du 26 juin 2021.

Faisant partie de la catégorie des commerçants dont l’activité a été partiellement paralysée par la nouvelle politique de distribution d’eau, Said, propriétaire d’une station de lavage à Sour El-Ghozlane a livré hier au Jeune Indépendant son témoignage. Il a expliqué qu’il a dû se munir d’une citerne de 300 000 m3 afin de pouvoir ouvrir son garage et recevoir ses clients, ajoutant que, dans la plupart des cas, il est dans l’obligation de fermer le local lorsque les quantités d’eau stockées sont épuisées.

«Depuis trois semaines, ces perturbations de l’alimentation en eau ne cessent de nous tarauder l’esprit. C’est devenu un véritable casse-tête ! Je suis contrains d’acheter chaque jour une citerne d’eau de 300 000 m3, en plus des réserves que j’ai dans le local. Il arrive que toutes ces quantités ne suffisent pas pour la journée, surtout que les riverains, à court d’eau pendant cinq jours, viennent remplir de l’eau chez moi», a-t-il relaté.

L’impact d’une pareille situation se fait sentir dans la situation financière de ces commerçants, en constante dégradation. Said a fait savoir qu’en plus des répercussions de la crise sanitaire de la Covid-19, une deuxième crise vient en rajouter une couche.

«Nous sommes très affectés par cette situation. Nos revenus sont en baisse constante alors que nous devons nous acquitter des charges fiscales et parafiscales. Crise économique, Covid-19, pénurie d’eau…, nous sommes dans un embarras extrême», a-t-il lâché inquiet.

Une décision «logique» en période de crise

A propos des répercussions des dispositions mises en place par les autorités publiques en vue d’économiser la consommation d’eau, les experts en économie y voient une décision «logique» en période de crise.

Selon l’économiste Abderrahmane Beriche, il s’agit de penser, en premier lieu, aux ménages, à même de «leur garantir le seuil minimal en eau et éviter une instabilité sociale».

«Nous sommes en crise et cela implique de nous passer des normes adoptées en temps normal. L’objectif, aujourd’hui, est d’assurer le seuil minimal d’eau aux ménages, selon une politique de rationnement de cette ressource. Ce qui va se répercuter sur d’autres secteurs classés au rang des grands consommateurs d’eau, et ce d’autant que nous ne donnions pas d’importance à l’économie de l’eau auparavant», a expliqué le spécialiste dans une déclaration au Jeune Indépendant.

Il a souligné que «ces dispositions fermes s’imposent» pour qu’on puisse prendre en charge les besoins domestiques et garantir, à l’avenir, une sécurisation en eau. «L’être humain passe avant le commerce, l’industrie et l’agriculture», a-t-il argué.

M. Beriche a fait observer que cette situation est le cumul d’une mauvaise gestion des années durant, sans prospection ni perspective en la matière, tant le secteur des ressources en eau a été, a-t-il poursuivi, parmi les plus budgétivores. L’expert a en effet fait état de pas moins de 50 milliards de dollars de budgets alloués en vingt ans.

«Il y a eu beaucoup de gaspillage d’eau lorsque ont été adoptées des méthodes classiques dans l’irrigation, en plus du gaspillage dans le secteur industriel et le manque de sensibilisation quant à l’impératif de rationnaliser la consommation en eau en période de disponibilité de cette ressource», a-t-il fait constater.

Evoquant la subvention de l’Etat du prix de l’eau, l’économiste a estimé qu’un mètre cube d’eau dessalée coûte environ 75 à 80 DA alors que le consommateur le paye 3,6 DA.

Selon le spécialiste, aujourd’hui, l’enjeu principal pour l’Etat est que cette pénurie d’or bleu ne se transforme pas en crise sociale.

Dans les cercles officiels, des sources indiquent que le département de Kamel Mihoubi est «insatisfait» des prestations de la société SEEAL, chargée de la gestion de la distribution d’eau au niveau d’Alger et des wilayas limitrophes. On affirme aussi que cette situation d’«austérité» va durer jusqu’à la prochaine saison hivernale.

Le ministre des Ressources en eau, Kamel Mihoubi, avait d’ailleurs, à maintes reprises, exprimé son «mécontentement» quant aux services assurés par le partenaire français SEEAL, signifiant que l’Algérie ne compte pas renouveler le contrat de gestion conclu pendant la période précédente. La SEEAL a été accusée de «mauvaise gestion de cette ressource précieuse pendant des années et du gaspillage suite aux fuites non réparées estimées à 45%».

Les experts en hydraulique, eux, expliquent que le stress hydrique est dû généralement au réchauffement climatique qui frappe tout le globe terrestre. Les taux de pluviométrie ont donc connu une baisse sensible ces dernières années, malgré une petite augmentation constatée cette année. Ce qui, de leur avis, explique que «la mauvaise gestion» reste la principale raison de la pénurie de l’or bleu

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