Pas de bénéfices pour Sonatrach : Les dettes plombent la raffinerie Augusta

Une odeur d’huile a été répandue il y a quelques semaines dans les milieux pétroliers algériens pour recouvrir les relents de scandale qui diffusait ses miasmes depuis l’Italie.
Le rachat par Sonatrach, via sa filiale hollandaise, de la raffinerie d’Augusta, en Sicile, qui a conduit à l’extradition puis à la détention de l’ancien PDG de Sonatrach, Abdelmoumen Ould Kaddour, en compagnie de trois autres anciens cadres dirigeants, ne serait pas finalement une mauvaise affaire, incline-t-on à faire croire.
La preuve, jacasse-t-on par la voix d’un canal médiatique proche de Ould-Kaddour et repris sans vérification par d’autres, elle a réalisé un bénéfice de 450 millions d’euros au premier trimestre 2022. Ce qui en effet serait une véritable performance.
Mais le bénéfice n’a été en fait que de 70 millions d’euros avant le paiement non encore effectué des impôts, ce qui amènera ce montant à être revu à la baisse, a assuré, ce mercredi 10 août, une source milanaise au fait de ce dossier sulfureux. « La somme due au fisc italien n’est pas encore connue », a ajouté la source au Jeune Indépendant soulignant qu’il est encore tôt de parler de bénéfices tant que les dettes n’ont pas encore été remboursées.
Le résultat est certes en amélioration par rapport aux exercices précédents mais il n’y a pas de quoi éponger le scandale. En 2019, Augusta a enregistré un déficit de 270 millions d’euros, suivant celui de 350 millions d’euros de 2020 (une perte due à la pandémie et à la chute drastique du prix du baril) pour s’équilibrer en 2021 avec un 60 millions d’euros, a fait savoir ce haut responsable italien.
Une lourde ardoise
Le temps de se gargariser de bénéfices demeure encore loin. Dans cette acquisition, la dette de Sonatrach reste toujours à la hauteur de 1.2 milliard d’euros. Elle n’a pas encore été remboursée en raison de la récession provoquée par la pandémie et son service a été recyclé en fonds de roulement.
C’est une dette actionnaire car Sonatrach est le seul actionnaire au sein de la SRI (Società raffineria italiana) dont le siège est à Milan. La SRI a remboursé pour 150 millions de dollars de subvention de la banque Apicorp.
Pour financer l’exploitation de sa raffinerie, Sonatrach a accordé à la SRI un prêt de 1.2 milliard d’euros, justifiant ainsi le qualificatif de “gouffre financier”.
En même temps, la SRI a contracté un prêt auprès la société Arab Petroleum Investments Corp (APICORP) à un taux d’intérêt bas, et ce en contrepartie de l’achat du pétrole saoudien et de travaux de maintenance nécessaires à son exploitation.
Le subterfuge de Mazighi
Le faux bénéfice de 450 millions d’euros n’est pas la seule tromperie dans cette tentative de blanchir les acquéreurs. En plus des 1,2 milliard d’euros, il y a aussi la dette commerciale qui s’élève à plus de 700 millions d’euros.
Pourquoi ? Parce que l’ex-vice-président des activités de la commercialisation du groupe pétrolier, Ahmed Mazighi, actuellement en prison, avait acheté du carburant de Russie puis il l’a déposé à Augusta et enfin l’a transféré vers l’Algérie pour faire croire que la raffinerie fournie des carburants à l’Algérie et que c’était une bonne affaire. A l’époque beaucoup avaient dénoncé l’achat de ce qu’il qualifiait de ferrailles (construite en 1949)
Mazighi, le principal artisan de l’acquisition de la raffinerie était le boss. Il a créé la SRI et tout mis en place pour l’acquisition de la raffinerie en date de décembre 2018. Quant à Abdelhamid Rais-Ali, vice-président chargé du raffinage et de la pétrochimie, également en prison, il a pris le relais en décembre 2018. Durant cette période, les importations de carburants étaient contrôlées par Mazighi au moment où aucune goutte de carburant n’est sortie de la raffinerie d’Augusta.
Ce que la raffinerie a coûté à l’Etat et donc aux contribuables algériens.
Le prix d’achat a été de 1.3 milliards d’euros, tel qu’annoncé par Exxon, l’ancien propriétaire. La Banque d’Algérie a payé cash 920 millions d’euros (700 millions prix de la raffinerie plus de 150 millions d’avance sur les prix du produit plus 70 millions frais de notaire). Il a aussi fallu régler la facture des produits laissés lors de la cession qui s’élevaient à 600 millions d’euros.
Après paiement de 920 millions de dollars pour l’achat de cette raffinerie, acquise le 1er décembre 2018, cette dernière a présenté un bilan fiscal 2018 présentant une dette commerciale et actionnaire de 850 millions d’Euros.
Qui gère la SRI? SPIC Bv ( Sonatrach petroleum investment company) basée à Amsterdam, hollande est l’actionnaire principal , SPIC Bv a acheté la raffinerie qui a elle-même créé la SRI dont le siège est à Milan. SPIC Bv a contracté des prêts auprès des filiales de SH à l’étranger pour assurer le fonds de roulement vu que la SRI s’est retrouvé avec zéro (0) euros pour faire tourner la raffinerie et payer les employés. Curieusement l’actionnaire principal SPIC bv était dirigé par un ancien directeur alors que la SRI était gérée par un Vice-président, selon la même source.
Salle Omnisports ??!!!
Contrairement à ce qui est colporté aussi, Sonatrach n’a pas réalisé ou participé au financement d’une salle omnisports à Augusta.
En revanche, Sonatrach Raffineria Italiana (SRI) en tant que société citoyenne a aidé la mairie de Syracuse pour le forage d’un puits d’eau en plus de quelques aides minimes en faveur de l’environnement ainsi que des aides durant la pandémie Covid, mais jamais elle n’a financé de salle omnisports, a souligné ce responsable.
Ce n’est pas fini : Augusta a conclu un accord exclusif de livraison d’huiles pendant 10 ans. Il stipule que la compagnie américaine a un droit de regard sur la qualité du brut utilisé ainsi que tout le processus de fabrication des huiles fabriquées par la raffinerie. Exxon se réserve le droit d’arrêter le processus si les procédures et les normes de fabrication ne sont pas respectées. Inédit!
Lire aussi: Les dessous de “l’affaire Augusta”: De quoi Ould Kaddour est-il accusé ?
Last but not the least : La raffinerie d’Augusta ne compte parmi ses salariés qu’un seul Algérien, le directeur financier en l’occurrence. Tout le reste du personnel est italien. L’industrie pétrolière appartenant à des compagnies étrangères sur place emploient des salariés de leur pays d’origine notamment aux postes de management. C’est le cas par exemple pour la russe Lukoil, la sud-africaine Sasol et autre universalis….
Même en maintenant le personnel italien, évitant ainsi une crise sociale à la municipalité, les douanes ont imposé un cautionnement de 180 millions d’euros à la raffinerie en plus des délais de recouvrement de la TVA fixés à huit mois. Cela représente une somme de 320 millions d’euros qui pourraient alléger le poids de la dette.
Pour le moment, les Douanes italiennes font la sourde oreille en dépit des sollicitations publiques de l’ambassadeur d’Algérie à Rome Abdelkrim Touahria, formulées aux responsables locaux de la commune de Syracuse.
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