Nouveau gouvernement face à la nouvelle Assemblée : Que va faire Tebboune?

Aussi paradoxal que cela puisse paraitre, l’artisan des élections législatives anticipées et le défenseur convaincu de la feuille de route électoral, n’a ni réagi, ni commenté l’évènement dix jours après sa tenue dans les conditions que l’on sait. Aucun mot soufflé, ni un petit message aux algériens votants ou pas.
Pourtant, on a qualifié ces joutes comme l’un des fondements dans la construction de « l’Algérie nouvelle », dans son volet institutionnel. En moins de six mois, cette architecture et son édifice ont été parachevé au pas de course, avec la révision du régime électoral et le changement du mode de scrutin, la création de nouvelles wilayas, la mobilisation de la logistique pour la campagne électorale et son accompagnement sécuritaire. Un immense chantier ouvert dans une conjoncture particulière sur tous les plans.
Le constat, qui n’est nullement un reproche ou un manquement, est là. Les résultats et les scores obtenus offrent-ils au président de la République, Abdelmadjid Tebboune, toute la latitude pour poursuivre sans anicroches son programme? Est-il gêné par le retour des anciennes forces partisanes qui lui furent, ne l’oublions pas, hostiles et rivales à sa candidature lors des présidentielles de décembre 2019? Le FLN et le RND ont roulé pour le candidat Azzedine Mihoubi, El Moustakbel et El Bina pour leurs patrons Belaid et Bengrina respectivement, alors que le MSP avait boycotté.
Comment va procéder Tebboune avec ces partis, revigorés plus que jamais, alors qu’il souhaitait un Parlement plus jeune, plus dynamique et plus moderniste? Les listes indépendantes qui ont arraché la deuxième place derrière le vieux parti FLN, ne sont guère homogènes, ni sur le plan des idées, ni sur le plan organique. Un vrai maelström. Difficile dans ces conditions de composer avec toutes les équilibres voulues un exécutif soudé et pragmatique.
En attendant sa réaction, Tebboune n’a convoqué ni son traditionnel Conseil des ministres ( normalement un dimanche), ni accorder des entretiens, même express, aux représentants de la presse internationale, qui étaient accrédités pour la couverture du scrutin. Pour de nombreux observateurs, à part son désintérêt pour le taux de participation, qu’il a ouvertement exprimé le jour du vote, personne ne connaît aujourd’hui les intentions politiques du chef de l’Etat, notamment dans la mise en place d’un nouveau gouvernement. Au moins cinq noms sont avancés pour ce portefeuille, avec le maintien de quelques ministres.
L’opinion nationale, elle-même désabusée politiquement et accablée par la pression continue des crises économique et sanitaire, semble être sur le qui-vive, aux aguets, attendant des signaux palpables.
Selon la Constitution, le nouveau Parlement procèdera à son installation dans la première semaine de juillet, après l’annonce officielle des résultats et l’examen des recours par le Conseil Constitutionnel, qui seront communiqués probablement dans une semaine. Or, sur le plan règlementaire, cette période coïncide avec le départ en vacances de l’APN pour deux mois, puisque le dispositif n’autorise qu’une session unique de dix mois par an. Tebboune va-t-il désigner un gouvernement en dehors de la session de l’APN? Si la législation lui permet de gouverner par ordonnance, comment va procéder son gouvernement, qui sera appelé à présenter son programme d’action et avoir l’aval des parlementaires?
Rien qu’avec la désignation d’un président de l’APN, de ses adjoints, la constitution des commissions spécialisées, leurs présidents et rapporteurs, la création des groupes parlementaires et le vote du règlement intérieur prendront du temps, en raison des ambitions et des divergences au sein même d’un seul parti. Une opération qui va encore durer quelques semaines. Comment dans ses conditions parle t-on d’alliances? Quel sera la forme de ce gouvernement? Majorité parlementaire ou présidentielle? Comment sera fait ce face à face inédit entre un nouveau Parlement et un nouveau exécutif?
Autant d’interrogations que seul le président de la République est capable d’y répondre, en commençant d’abord par choisir un Premier ministre. Ou maintenir l’actuel pour quelques mois encore, le temps d’achever toute la façade.
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