Mali, les rebelles mis en demeure
Ils sont nombreux les observateurs à s’interroger sur les raisons de la recrudescence des attentats dans le nord du Mali alors que, parallèlement, les branches politiques des auteurs des violences sont en conclave quasi permanent à Alger pour mener les pourparlers avec les représentants du gouvernement malien et doivent aboutir à un accord de paix durable. Une surenchère des armes qui coïncide avec les avancées palpables dans le processus des négociations. Qui a intérêt à saboter le succès de la médiation internationale conduite par l’Algérie ? Focus.
Ce n’est pas nouveau en soi.
A chaque fois que des négociations ont lieu entre deux parties opposées dans de graves conflits comme celui qui empoisonne le Mali voisin depuis des décennies, les parties versent dans la pression par relais interposés. On peut ainsi se figurer que c’est malheureusement le cas en ce qui concerne les groupes politico-militaires du Septentrion malien, tous engagés dans le processus de paix, devant Dieu et devant les hommes. Du MNLA, intransigeant sur la question d’une nouvelle forme de gouvernance allant jusqu’à titiller l’intégrité territoriale du Mali, jusqu’au MAA, cherchant à tout prix à se repositionner positivement auprès du pouvoir central, les acteurs de la rébellion ont chacun une part de responsabilité dans le retour à l’expression des armes.
Viol du cessez-le feu
Ces derniers jours ont été marqués par de multiples attaques et dérapages. Du côté de la localité de Tabankort, les combats ont fait rage entre le MAA (appuyé par le GATIA) et le MNLA sans qu’aucun bilan crédible n’ait été rendu public. Les factions revendiquant dans une autre bataille, celle de la communication, un succès militaire pour affirmer leur représentativité mise en cause par les parties opposées.
Démarche contraire à l’accord de Ouagadougou et la déclaration de cessation des hostilités qui tablaient sur une trêve de longue durée pour assurer les conditions d’un dialogue inclusif des plus prometteurs. Morts, destruction et engrenage infernal sont le prix de la surenchère qui met en péril, à chaque coup de feu, le difficile retour vers la paix définitive dans le nord du Mali.
La MINUSMA, cible et prétexte
La dégradation, récurrente maintenant, de la situation sécuritaire depuis le 18 juin 2013 (correspondant à la signature de l’accord de Ouagadougou), interpelle d’autant plus qu’elle vise aussi souvent les contingents de la MINUSMA, alimentant ainsi la confusion entre la problématique de l’insoumission des communautés autochtones armées et celle du terrorisme international. Bien entendu, ce type de régression, par rapport à la décantation politique qui se fit au lendemain de l’intervention militaire française Serval, semble servir les adversaires de l’option du dialogue.
Et, comme cette voie pacifique pour une solution définitive à la crise malienne colle naturellement à l’Algérie qui l’a toujours défendue, on peut penser que derrière les tentatives de rallumer le feu dans les cercles de Gao ou de Tombouctou, se cachent des adversaires d’Alger. Forces étrangères décidées à s’attarder en pays malien et au Sahel ou narcoterroristes profitant du chaos, les ennemis du dialogue inter malien existent, visiblement.
Médiation et mise en demeure
Une situation si tendue que le Conseil de sécurité vient d’adopter une résolution (voir notre édition d’hier) pour tenter d’exhorter les différentes parties de revenir à leur engagement et de sauver une médiation torpillée au moment où elle annonçait une évolution plus positive, compte tenu de la complexité de la tâche. Dans certains milieux initiés, on susurre que des menaces de suspension de l’aide internationale, qui profite aux populations locales dans l’extrême précarité, ont été signifiées aux chefs de groupe impliqués dans les derniers accrochages.
L’Algérie, qui par la voix de son chef de la diplomatie a manifesté sa patience et la pérennité de son engagement, en s’accordant un délai de six mois pour aboutir à un accord significatif, n’aurait pas hésité non plus à mettre les négociateurs maliens hébergés à Alger devant leurs responsabilités. Un durcissement courtois perçu comme une mise en demeure dont les effets seront à évaluer lors du prochain round des négociations.