Les mouvements associatifs déconnectés de la société
La faiblesse des mouvements associatifs en Algérie a favorisé l’émergence des mouvements de protestations sociales qui ont gagné les villes intérieures et le sud du pays, selon le sociologue Nacer Djabi.
« Caractérisés par le manque d’organisation et leur forte dépendance financière de l’Etat, les mouvements associatifs en Algérie n’ont pas d’impact sur la société, ce qui favorise l’éclatement des mouvements de protestation et les émeutes », a estimé Djabi lors d’une conférence sur les mouvements sociaux dans le pays, animée vendredi soir au siège du Rassemblement action jeunesse (RAJ).
En dépit de leur nombre qui dépasserait 90 000 associations locales et nationales, ces formations n’arrivent pas à mobiliser les gens autour de projets de société, a-t-il souligné. Quant à l’émergence des mouvements sociaux qui gagnent de plus en plus les villes intérieures et le Sud, Djabi les attribue principalement à l’implantation d’universités dans ces régions et à la disponibilité des moyens de transport et des nouvelles technologies de l’information et de la communication qui ont favorisé l’émancipation des populations notamment dans le milieu estudiantin.
Il a toutefois rappelé que ces mouvements de protestation sociale ont émergé en Algérie au milieu des années 1980, mais qu’ils se limitaient aux grandes villes à l’instar d’Alger, Oran et Constantine, et particulièrement dans les quartiers populaires « usiniers » à forte concentration juvénile. « Ces mouvements sont généralistes de par leur composante et leurs revendications », a-t-il noté, ajoutant qu’ils s’expriment parfois par la violence.
Ce chercheur du CREAD, qui est revenu sur la faiblesse du mouvement associatif, a fait remarquer que malgré leur nombre croissant, les associations ne produisent pas d’élite et manquent à leur rôle en tant que « force de proposition » au sein de la société. « Mal structurés, la plupart d’entre eux n’ont pas un plan d’action préalable qui défini les priorités », a-t-il affirmé en notant que malgré la présence de ces associations dans pratiquement tous les domaines d’activité, leur influence sur la société est quasi-nulle car ils sont incapables de mobiliser de larges catégories de la société.
Il a rappelé que la naissance du mouvement associatif en Algérie, vers les années 1990, a coïncidé avec le début d’une étape difficile de l’histoire du pays et que les gens à l’époque manquaient d’expérience sur le rôle des associations en tant que société civile.