Les gendarmes de l’INCC entrent en lice à Gossi
Des gendarmes experts de l’Institut national de criminologie et de criminalistique (INCC) ont été envoyés jeudi dernier vers Gossi, lieu où le vol AH 5017 s’est écrasé, tuant les 118 passagers qui se trouvaient à bord. Le recours aux gendarmes experts de l’INCC fait suite à la demande du gouvernement algérien auprès du Commandement de la Gendarmerie nationale, à sa tête le général major Ahmed Bousteila.
Selon une source bien informée proche de la Gendarmerie nationale, quinze gendarmes experts de l’INCC se sont déplacés depuis jeudi passé au Mali afin de mener des investigations consistant en l’identification des six Algériens tués lors du crash de l’avion à Gossi. Mieux, les spécialistes de l’INCC procéderont également à l’expertise sur les cadavres des étrangers ayant péri lors de ce drame. D’après cette source, un colonel de l’INCC chapeautera la délégation algérienne tout au long de son séjour sur le lieu du sinistre, où des tentes seront dressées par les gendarmes algériens afin de mener de plus près les recherches.
Dès leur arrivée à Bamako, la délégation algérienne a eu droit à un hélicoptère, aménagé par l’ONU pour transporter les gendarmes algériens vers le lieu du sinistre. Les investigations ont déjà commencé hier, évoque la même source sous couvert de l’anonymat. Pour sa part, le directeur de la Police judiciaire à la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN), Abdelkader Kara Bouhadba, a appelé avant-hier, lors d’une conférence de presse, à la patience et à la sérénité en attendant ce que révélera l’enquête sur le crash au Mali de l’avion affrété par Air Algérie et qui a fait, rappelons-le, 118 morts, parmi eux 6 Algériens.
Une enquête qui sera vraisemblablement longue du fait de l’ampleur des dégâts ayant suivi le crash, les corps des 118 passagers ayant été complètement déchiquetés, en plus du fait que l’avion a été entièrement détruit et que les conditions géographiques et climatiques ne sont pas favorables pour prélever des empreintes sur les victimes et les garder intactes sur place.
Ce qui a affecté énormément la mission des experts de la police scientifique de la DGSN, à l’instar des autres experts venus de 14 pays. Sur place depuis le 25 juillet dernier, les 13 spécialistes de la police scientifique algérienne n’ont pas pu identifier aucun passager pour le moment, mais cela ne freinera pas l’évolution de l’enquête car les fruits des recherches et des investigations commenceront à apparaître dans les jours qui viennent, rassure le directeur de la PJ.
«Suite à la catastrophe aérienne qui a touché l’aéronef affrété par la compagnie nationale Air Algérie, assurant le vol AH 5017 Ouagadougou-Alger, une cellule de crise a été aussitôt installée au niveau de l’aéroport Houari-Boumediene, dans laquelle la DGSN est représentée», explique le conférencier. «C’est à ce titre qu’une équipe de spécialistes de la police scientifique et technique de la Sûreté nationale, composée de 13 enquêteurs, s’est rendue le 25 juillet, soit au lendemain du crash de l’avion, au Mali et au Burkina Faso au sein d’une délégation nationale multisectorielle conduite par le ministre des Transports, Amar Ghoul, et de président de la cellule de crise», ajoute-t-il.
Abdelkader Kara Bouhadba a indiqué que suite à l’action de l’Etat, cette équipe pluridisciplinaire composée de 13 spécialistes (ADN, empreintes digitales et gestion de scène de grandes catastrophes) a pu être transportée à partir de la capitale malienne vers l’endroit du sinistre, pour se joindre aux experts espagnols et français.
Dès leur arrivée sur le site avec la délégation algérienne, les éléments de la police scientifique ont constaté que le lieu est difficile d’accès face à l’étendue de la catastrophe et à l’ampleur des dommages occasionnés par le crash. Sur place, les scientifiques de la DGSN ont aussi constaté le degré de fragmentation des éléments de l’aéronef et leur éparpillement renseigne sur l’ampleur et l’intensité du crash (appareil complètement pulvérisé). En plus, l’absence de corps entiers, car entièrement déchiquetés, a péniblement affecté leur mission.
Face à cette situation, la contribution des spécialistes algériens au processus de gestion de cette catastrophe devait répondre, conjointement avec les autres experts, à une priorité de premier ordre : apporter soutien et soulagement aux familles des victimes, lesquels soutien et soulagement ne peuvent être possibles que par la gestion rapide du processus d’identification, notamment dans sa phase de terrain. Complètement intégrée au dispositif sur site, l’équipe de la DGSN a entamé ses activités selon un plan d’organisation du travail fixé conjointement avec les équipes internationales présentes sur les lieux, et ce, conformément aux normes et standards internationaux recommandés dans le processus d’identification des victimes de catastrophes «IVC», issus de plusieurs nationalités étrangères.
Toutefois, la mission des 13 policiers experts s’est avérée très difficile à réaliser en un laps de temps court, vu le caractère inhospitalier du site concerné situé dans une zone déshéritée, difficilement accessible, sablonneuse et avec beaucoup de broussaille. Cet environnement se caractérise également par une température élevée pouvant atteindre plus de 45°C et par des pluies orageuses.
Ces conditions géographiques et climatiques ont influé de manière notable sur le travail des experts et peuvent même rendre inexploitable les prélèvements destinés à l’identification des victimes, a indiqué le conférencier.
L’ensemble des équipes concernées par ce processus a, en raison de l’importance de la mission, été amené à vivre sur site durant toute la période nécessaire et à travailler à un rythme soutenu de plus de 10 heures par jour dans les conditions évoquées ci-dessus. L’expérience acquise dans l’identification des victimes de catastrophes majeures (naturelles, technologiques ou criminelles) a rendu significative la contribution algérienne qui a permis grandement de réduire la durée des opérations sur le terrain où, il est utile de le noter, les spécialistes algériens et étrangers ont fait preuve d’un fort esprit de coordination.
Il convient aussi d’indiquer que les autorités maliennes ont affiché une disponibilité et une franche et précieuse collaboration. Des prélèvements ont pu être effectués sur site, d’autres ne peuvent être possibles que dans des centres d’expertises.
Malheureusement, plusieurs fragments de corps et des restes humains se sont avérés inexploitables. Sur un autre registre, les bureaux centraux nationaux Interpol des pays concernés, notamment le BCN Interpol-Bamako/Mali et le BCN Interpol- Ouagadougou/Burkina Faso, ont été tous mobilisés dans le cadre de la gestion de cette catastrophe.
Le secrétariat général d’Interpol a, pour sa part, mis en place dès le 26 juillet une cellule de crise (IRT/Incidence Response Team) pour faciliter la coopération et l’échange d’informations relatives à ce sinistre entre les 15pays concernés. Les considérations humanitaires doivent prévaloir dans de telles situations comme ce fut le cas dans des catastrophes aériennes enregistrées par le passé, où souvent les victimes sont de diverses nationalités, ce qui, par voie de conséquence, implique une étroite coopération entre les Etats.
L’identification des victimes est souvent un processus complexe nécessitant de longues périodes de travail sur le plan opérationnel, technique et scientifique, et qui à appelle la mobilisation de différents intervenants aux compétences diversifiées.
Avant de conclure, le directeur de la PJ a appelé les familles à s’armer de patience et de sérénité dans cette épreuve de grande peine, tout en apportant compassion, solidarité et accompagnement dans leur douleur.