Les frères Kouninef et Rebrab chez le procureur
Après l’appel lancé par le chef d’état-major de l’armée Ahmed Gaid Salah à la justice en vue d’accélérer les enquêtes sur la corruption et la dilapidation de deniers publics, le parquet de Sidi M’hamed est passé à l’action. Les frères Kouninef ont été arrêtés hier par la Gendarmerie nationale.
Les frères Kouninef ont été arrêtés par la brigade de recherche de la gendarmerie dans le cadre d’une enquête sur la conclusion de marchés publics avec l’Etat, trafic d’influence avec des fonctionnaires publics, détournement de foncier, selon la même source qui évoque des contrats avec l’Etat qui n’ont pas été honorés. Ils seront présentés au procureur de la République dès la fin de l’enquête. Les frères Kouninef : Réda, Abdelkader et Noah sont connus pour leur proximité avec Said Bouteflika. Ils étaient jusque-là intouchables. Ils forment le cœur de l’oligarchie, obtenant des contrats juteux dans plusieurs secteurs névralgiques comme l’hydraulique, les télécommunications ou le BTP. Leur groupe familial KouGC fait partie des groupes privés les plus prospères en Algérie. Son chiffre d’affaire dépasse facilement les 150 millions d’euros. Ils figurent officiellement sur la liste des hommes d’affaires et personnalités interdits de quitter le territoire algérien.
C’est une chute brutale pour ceux qui avaient l’habitude de faire et défaire les dirigeants politiques en Algérie ces dernières années. Réda Kouninef pèse, à lui seul, pas moins de 400 millions de dollars. Il est le cerveau de la fratrie et son nom figure en tête de liste de ces personnalités qui ne peuvent plus quitter légalement le pays. Des personnalités qui seront bientôt convoquées par des enquêteurs de la Gendarmerie nationale pour s’expliquer sur plusieurs dossiers compromettants. Par ailleurs, la GN a convoqué plusieurs personnalités politiques et acteurs de l’économie nationale pour les auditionner sur plusieurs affaires. Les dossiers des mis en cause seront ensuite remis au juge d’instruction du pôle judiciaire du tribunal de Sidi M’Hamed pour répondre aux graves inculpations retenues contre eux. Samedi dernier, le tribunal de Sidi M’hamed (Alger) a convoqué Ahmed Ouyahia, ex- Premier ministre, et Mohamed Loukal, ministre des Finances et ex-gouverneur de la Banque d’Algérie (BA), pour des affaires de dilapidation des deniers publics et de privilèges indus. Si Ahmed Ouyahia a envoyé son avocat le représenter, le ministre des Finances Mohamed Loukal a, quant à lui, préféré poursuivre ses activités professionnelles.Ce mardi ils ont reçu les convocations de la justice. Elles leur ont été remises lundi par la Gendarmerie.
En plus des hauts responsables cités plus haut, deux sénateurs et anciens puissants ministres très proches du clan Bouteflika, Said Barkat et Djamel Ould Abbès, sont actuellement dans le collimateur de la justice qui réclame la levée de leur immunité parlementaire : « Effectivement, le Bureau du conseil de la nation a été saisi la semaine dernière par la justice en vue de la levée de l’immunité parlementaire des deux sénateurs Said Barkat et Djamel Ould Abbès. La Commission des affaires juridiques se réunira aujourd’hui pour examiner la recevabilité de la demande et dans le cas où celle-ci est jugée recevable, elle convoquera une séance plénière pour voter cette demande, selon l’article 110 de la Constitution. Selon l’article 127 de la Constitution, « les poursuites ne peuvent être engagées contre un député ou un membre du Conseil de la nation (sénateur), pour crime ou délit que sur renonciation expresse de l’intéressé ou sur autorisation, selon le cas, de l’Assemblée populaire nationale ou du Conseil de la nation, qui décide à la majorité de ses membres la levée de son immunité parlementaire ». Ces deux sénateurs, actuellement membres du tiers présidentiel, seraient accusés de « détournement de fonds
publics ils étaient ministres en charge du département de la Solidarité nationale et de la Famille entre 1998 et 2008 », précise la même source. L’éventuelle présentation au parquet de ces deux sénateurs marquerait, à coup sûr, un tournant majeur dans l’exercice de la justice, dont les magistrats sont souvent inhibés par les risques de mise au placard, de passage devant le Conseil de discipline ou de mutation.
Ould Kaddour et Rais sur la pente raide
Les choses semblent s’accélérer dans les dossiers de l’affaire Sonatrach. Agissant sur instruction de la justice, des officiers de la police judiciaire se sont présentés mercredi dernier à la direction générale de Sonatrach pour réclamer des dossiers auprès de la direction commerciales. L’achat de la raffinerie d’Augusta, qui n’était pas prévu dans les plans de la direction commerciale, a subitement été imposé par Abdelmoumen Ould Kaddour sur la base des conseils de Abdelhamid Rais-Ali, le vice-président de raffinage et pétrochimie. Les représentants de la justice s’intéressent aussi au projet SH 2030. La boîte américaine de consulting (Boston Consulting Group) a été engagée par Oul Kadour en 2017 pour gérer le projet de transformations de Sonatrach. Certains des consultants sont payés 6 000 euros par jour, ce qui représente un immense gouffre financier pour Sonatrach.
La direction de transformation (SH2030) a été confiée à Fethi Arabi, un cadre inexpérimenté dans la gestion des projets et qui s’illustre, selon ses collègues par la satisfaction des demandes des consultants et le fait de ramener au sein de sa structure les proches du PDG et les membres des familles influentes, dont des filles de haut officiers supérieurs de l’armée et de Mohamed Rougab, l’ex-secrétaire particulier de Bouteflika. Mohamed Rougab a facilité les affaires à ses enfants, profitant d’un poste très influent. Il leur a notamment permis de devenir les leaders de l’événementiel et de la publicité via les sociétés Allégorie et Fifty4, qui s’occupent de la publicité des plus grandes entreprises algériennes et multinationales.