Les enfants victimes de la phénylcétonurie délaissés
En l’absence d’une prise en charge, les enfants atteints de la phénylcétonurie en Algérie, avancent inévitablement vers l’handicap. Associations et médecins lancent des cris de détresse aux pouvoirs publics
Méconnue, mais très redoutable, la phénylcétonurie est une maladie génétique rare et grave qui, en l’absence de traitement approprié, entraîne une arriération chez l’enfant. Elle est définie comme étant une maladie chronique en relation avec un trouble du métabolisme de la phénylalanine (acide aminé d’origine alimentaire), entraînant une accumulation de cette dernière dans l’organisme.
« Au fait, les aliments notamment la viande, les fruits et légumes, deviennent pour les malades atteints de la phénylcétonurie un poison qui attaque le cerveau », a expliqué hier le docteur Brahim Sâadaoui, du service de pédiatrie de l’hôpital Parnet.
« Ce mal est pourtant évitable par un simple dépistage de la phénylcétonurie effectué au cours du troisième jour de la naissance du bébé », a-t-il assuré lors du Forum du quotidien El Moudjahid consacré à la prise en charge des enfants atteints par ce mal. Le dépistage n’est pas du tout onéreux et l’appareil pour tester le taux de la fluométrie dans le sang ne devrait pas dépasser les 800 000 dinars.
« Cela devrait permettre au ministère de la Santé d’adopter une politique de prévention en procédant à des testes systématiques à travers tout le territoire du pays », a-t-il recommandé. Le directeur Sâadaoui plaide également le classement de la phénylcétonurie sur la liste des maladies chronique qui ouvrent droit à une prise en charge totale.
D’autant plus que le prix des médicaments et des aliments appropriés aux enfants atteints de ce mal sont exorbitants. « Le lait à 300 dinars la boîte, la farine à 500 dinars et les spaghettis à 180 dinars sans compter les compléments alimentaires et les séances de rééducation de ces enfants dans les structures spécialisés », a-t-il détaillé.
Contrairement à la Tunisie où le financement des produits diététiques et médicamenteux est à la charge totale de l’Etat, en Algérie la prise en charge étatique des enfants atteint de cette maladie rare très récente et se limite par l’apport des quotas de lait que les parents de malades récupèrent au niveau des structures pédiatriques des CHU Parnet et Mustapha.
« Ces enfants ont besoin de manger surtout lorsqu’ils dépassent l’âge de 2 ans. Ils doivent suivre un régime alimentaire strict jusqu’à l’âge de 16 ans au moins, et le coût de leur nourriture n’est pas à la portée des parents. Aussi la plupart des enfants ne mangent pas à leur faim pour ne pas dire qu’ils sont en train de crever de faim », s’est-il alarmé.
La présidente de l’Association algérienne du syndrome Williams – Beuren, Mme Faïza Medad, a saisi l’occasion de ce forum pour lancer un cri d’alarme aux différents ministères concernés notamment celui de la Santé, la Solidarité et le Travail pour la prise en charge des enfants atteints de ce mal handicapant.
Accompagnée d’enfants malades et de leurs parents, la présidente de l’association affirme que ces malades et leurs parents sont pratiquement livrés à eux-mêmes. « Nous voulons au maximum leur éviter le pire en les prenant en charge à temps à travers une alimentation appropriée afin qu’ils puissent grandir comme des enfants normaux », a-t-elle lancé d’une voix émouvante.
Le nombre des enfants souffrant de ce mal est méconnu.
« On ignore le chiffre exact pour la simple raison que le ministère n’a pas fait de dépistage pour les recenser », a avoué le docteur Sâadaoui, en précisant que les cas comptabilisé par l’association s’élèvent à 500 malades. Un chiffre qui est loin de refléter la réalité, selon ce pédiatre qui avoue parmi ces cas enregistrés, il y a uniquement une centaine de malades qui sont pris en charge par l’Etat depuis une année environ.