Les chercheurs boursiers à l’étranger dans la tourmente
Les enseignants chercheurs et les étudiants doctorants boursiers qui se trouvent à l’étranger dans le cadre du Programme national exceptionnel (PNE) lancent un SOS aux hautes autorités du pays dont le président de la république pour résoudre leur situation qu’ils qualifient « d’intenable » .
Ils dénoncent «une mauvaise gestion» de leur dossier de la part de la tutelle qui refuse de leur accorder une prolongation de l’octroi de leurs bourses pour qu’ils puissent finir leurs formations dans le pays d’accueil.
Ayant bénéficié d’une bourse pour l’Espagne, au titre de l’année 2019/2020, Nassiba, doctorante en génie chimique à l’université de Blida, a indiqué ce vendredi au Jeune Indépendant que le problème soulevé par les chercheurs est relatif au refus de la direction de coopération et d’échange entre les universités au niveau du ministère de l’Enseignement supérieur de prolonger l’octroi de leurs bourses alors que la pandémie de la Covid-19 a rendu impossible la poursuite de leur formation dans les établissements universitaires d’accueil.
Selon cette doctorante, les boursiers entendent solliciter, cette fois-ci, le président de la République dans l’espoir qu’il intervienne et prenne en charge leurs griefs, d’autant que ces boursiers actuellement coincés à l’étranger, risquent de se retrouver sans ressources financières alors que leur séjour de formation tire à sa fin.
L’interlocutrice a précisé que la grande majorité des chercheurs boursiers dans le cadre du PNE 2019-2020 n’ont pas pu poursuivre leur stage au niveau des laboratoires de recherche, lesquels refusent, à leur tour, de signer les rapports de stage étant donné que ces structures étaient fermées en raison des mesures de confinement instaurées à l’échelle mondiale.
Elle estime que les seules victimes dans cette situation «sont les chercheurs algériens qui se voient livrés à eux-mêmes, contrairement aux boursiers des autres pays qui n’ont pas eu à subir la même situation»
Dans une lettre ouverte adressée au mois de septembre au président de la République, dont le Jeune Indépendant détient une copie, les rédacteurs de la requête expliquent que «les dépassements subis sont d’ordre administratif et scientifique».
Il s’agit d’abord «d’une réduction injustifiée de la durée de la formation à 7 et 11 mois au lieu de 18 mois ainsi que le maintien de la durée de 10 mois pour ce qui est de la soutenance des thèses, à compter de la date de la fin de la formation de chaque boursier », est-il précisé dans le même document. Il y est dénoncé également l’ensemble des dispositions annoncées par le ministère de l’Enseignement supérieur informant de la possibilité de rapatriement, à partir du 15 mai dernier, des boursiers algériens au vu des circonstances sanitaires mondiales.
Pour leur part, les représentations diplomatiques algériennes déploient un autre son de cloche, soulignant que «les boursiers sont tenus par l’obligation de poursuivre leurs travaux de recherche dans le cadre des dispositifs mis en place par les universités d’accueil».
Contactée par le Jeune Indépendant, l’enseignante chercheur en génie des procédés à l’université d’Adrar, Ghania Radji, considère que «de telles décisions contradictoires n’ont pas tenu compte de la spécificité des différentes spécialités des chercheurs, qui nécessitent, pour la plupart d’entre elles, leur présence physique dans les laboratoires de recherche».
L’enseignante évoque aussi «le manque de communication et de suivi des correspondances adressées aux services concernés, que ce soit au niveau de la tutelle ou des représentations diplomatiques afin de trouver des solutions à leurs préoccupations pressantes».
«Nous sommes en contact avec pas moins de 169 boursiers dans différents pays qui vivent la même situation de confusion et adhèrent à notre démarche, dans l’espoir d’aboutir à une issue raisonnable à même de rétablir ces chercheurs dans leurs droits les plus stricts», espère-t-elle.
Par ailleurs, et en plus du refus «catégorique» concernant la prorogation des délais de formation envoyés par e-mail aux boursiers, certains étudiants ont vu, il y a quelques semaines, leur titre de séjour en Europe expirer, les plongeant ainsi dans une situation inextricable. Ils sont en effet contraints de circuler sans papiers, explique au Jeune Indépendant Adem, doctorant boursier en sciences politiques à l’université d’Alger 3.
Quant au rapatriement d’une partie des chercheurs au mois de novembre, il a été effectué, poursuit notre interlocuteur, selon des procédures des plus anarchiques.
«En dépit de toutes les mesures de confinement et de la fermeture des frontières, les boursiers algériens en Europe ont été obligés de se déplacer à Madrid pour être rapatriés. Ils sont restés plus de 24 h à l’aéroport dans des conditions inhumaines, sans parler de ceux qui ont raté leur vol. Une fois arrivés en Algérie, ils ont été conduits à une résidence universitaire inhabitable à El-Affroun (Blida) pour y passer la durée de confinement avant qu’ils ne changent de structure» a-t-il déploré.
Néanmoins, ces boursiers semblent ne pas vouloir renoncer à leurs droits et voir les efforts de plusieurs années partir en fumée.