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Législatives en France: Macron plus faible que jamais

Législatives en France: Macron plus faible que jamais

Le banquier Emmanuel Macron s’est révélé moins brillant en politique après cinq à la tête de l’Etat français. Réélu le mois dernier pour un nouveau quinquennat lors d’un vote-refuge, il n’a pas réussi à obtenir aux législatives la majorité absolue qui va lui permettre de conduire la politique qu’il désire.

La République en marche, parti de notables qu’il a créé en 2017 n’a jamais réussi à s’ancrer au sein de la société. Avec des alliés du centre, il a remporté seulement 245 sièges loin des 289 qui constituent la majorité absolue. Emmanuel Macron apparaît maintenant isolé, au centre d’un paysage politique chamboulé.

A l’issue du second tour des législatives dimanche, les candidats macronistes Ensemble remportent 245 sièges, devant la coalition de gauche Nupes et ses alliés (137 sièges) et le RN (extrême droite) qui réalise une percée historique (89 sièges). Le nouvel hémicycle comptera 37,3% de femmes, en recul par rapport à 2017 (39%).

Le chef de l’Etat a perdu dans les grandes largeurs la majorité absolue (établie à 289 sièges sur 577) qui, pendant cinq ans, avait voté tous ses projets pratiquement sans discuter. Il hérite à la place d’une Assemblée nationale où à défaut de majorité, vont siéger deux oppositions puissantes qui lui sont résolument hostiles.

Des gifles et un pouvoir qui vacille
Conséquence: deux mois après sa reconduction à l’Elysée, le mandat du président vacille déjà, ses projets de réforme, dont les retraites, aussi. Et la France avance politiquement en terre inconnue.

Symboles de la gifle reçue, les défaites des chefs de file de la macronie à l’Assemblée, deux intimes de M. Macron: le président Richard Ferrand battu dans son fief du Finistère et le patron des députés LREM Christophe Castaner dans les Alpes-de-Haute-Provence. Trois ministres – Amélie de Montchalin (Transition écologique), Brigitte Bourguignon (Santé) et Justine Benin (Mer)- ont également mordu la poussière.

« Il faudra faire preuve de beaucoup d’imagination » pour gouverner, a admis le ministre de l’Economie Bruno Le Maire.

Sur un ton plus volontaire, la Première ministre Elisabeth Borne a promis de « travailler dès demain (lundi) à construire une majorité d’action, il n’y a pas d’alternative ». Elle-même élue de peu dans le Calvados, elle a souligné que « cette situation inédite constitue un risque pour notre pays ».

Pour Emmanuel Macron aussi, les tout prochains jours s’annoncent agités. Il va devoir manœuvrer sur le front intérieur, avec un remaniement de son gouvernement, au moment-même où il sera happé dans un tunnel d’obligations internationales (Conseil européen, G7, sommet de l’Otan).

Autre figure de ce dernier marathon électoral : Jean-Luc Mélenchon. Il a réussi à faire de la gauche la première force d’opposition et de son mouvement , La France Insoumise, le premier parti de gauche. Pour autant, la Nupes n’a pas remporté la majorité qui lui aurait permis de s’emparer du poste de Premier ministre comme il en a rêvé après son échec à la présidentielle.

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Jean Luc Melenchon, la tête de locomotive des Nupes

Son avenir personnel s’inscrit désormais dans le champ de la réflexion et non sur la scène politique où il joue depuis 1976. Il ne participera pas directement à la guérilla parlementaire que la Nupes va mener à Emmanuel Macron mais il va sans doute fournir des armes.

Ensemble! devra aussi composer avec un Rassemblement national nettement renforcé qui, avec 89 sièges, constitue la grande surprise de ce deuxième tour, après une campagne en retrait, effacée par le duel entre le camp Macron et la gauche.

Le RN, qui ne comptait que huit députés élus en 2017, pourra former un groupe parlementaire pour la première fois depuis 1986, avec sans doute Marine Le Pen à sa tête. « Nous incarnerons une opposition ferme, sans connivence, responsable », a annoncé l’ex-finaliste de la présidentielle, réélue dans le Pas-de-Calais.

Les Républicains (LR), qui représentaient la deuxième force dans l’Assemblée sortante, conservent quelque 70 députés avec leurs alliés de l’UDI et des centristes, un chiffre quasi inespéré vu leur crash à la présidentielle. Leur position sera centrale dans l’Assemblée puisque le camp Macron aura besoin de voix pour atteindre la majorité absolue.

Le chef du parti Christian Jabob a affirmé que LR resterait « dans l’opposition » mais le maire LR de Meaux Jean-François Copé a appelé dimanche à un « pacte de gouvernement » avec Emmanuel Macron, estimant qu' »il appartient à la droite républicaine de sauver le pays ».

« Défaite humiliante » pour Macron
Pour Dominique Rousseau, professeur de droit constitutionnel à l’université Panthéon-Sorbonne, le second mandat d’Emmanuel Macron sera en tous cas « un quinquennat de négociations, de compromis parlementaires. Ce n’est plus Jupiter qui gouvernera mais un président aux prises avec une absence de majorité à l’Assemblée ». Et d’ajouter : « On va vers un quinquennat où le rôle du Parlement sera réhabilité. C’est la pratique de tous les autres pays européens ».

Pour la presse française de lundi, le résultat résonne comme une « gifle » ou une « claque » dans les oreilles de Macron. C’est une « défaite humiliante », et un « désaveu cinglant ».

En gros plan à la Une de la plupart des journaux, le visage d’Emmanuel Macron, tête basse dans Libération ou Les Echos ou les lèvres pincées dans Aujourd’hui en France, illustre, pour les journaux de droite comme de gauche, une défaite personnelle du chef de l’Etat.
« Miroir inversé de l’élection présidentielle, ce second tour des législatives ressemble furieusement à un référendum anti-Macron », écrit ainsi Alexis Brézet dans Le Figaro, qui évoque une « cruelle leçon pour le chef de l’Etat ».

« La faiblesse de son camp lui est en grande partie imputable », estime aussi Patrice Chabanet dans Le Maine Libre. « La politique, ce n’est pas une croyance aveugle en sa bonne étoile, nourrie par des succès antérieurs. Ce n’est pas non plus le refus du débat par un renoncement entêté à toute campagne. Ce n’est pas encore le primat de la politique étrangère sur les affaires intérieures ».

Pour Jean-Marcel Bouguereau dans la République des Pyrénées, « les électeurs ont eu le sentiment que Jupiter, avec des députés godillots, ne donnait pas à l’Assemblée le rôle qui lui revenait ».

« Les Français en ont eu assez de la surpuissance d’un homme et son camp. Ils ont contraint les partis à gouverner différemment », renchérit Sébastien Georges dans L’Est Républicain, pour qui « sanctionné, Macron va devoir composer ».

Une « obligation de composer », également soulignée par Frédéric Barrilé dans Le Maine Libre. L’ensemble des forces politiques « devront se livrer à une révolution culturelle », prévient Frédéric Vézard dans les Dernières nouvelles d’Alsace.

Si Aujourd’hui en France barre sa Une du seul « Ingouvernable », Ouest-France juge a contrario que « Le pays n’est pas +ingouvernable+ ».

Dans son éditorial, Stéphane Vernay estime que « le pouvoir va devoir faire l’objet d’un nouveau partage. C’est le choix des électeurs, qui imposent, par les urnes, une sévère cure d’humilité au maître des horloges. (…) La République en Marche ne peut plus rien imposer seule. Soit en bâtissant une nouvelle alliance avec Les Républicains. Soit en négociant chaque texte, demain, au coup par coup ».

Une analyse partagée par Patrick Jankielewicz dans La Voix du Nord, pour qui « il faudra au président quelques qualités essentielles qui ont semblé lui faire défaut: être réellement à l’écoute du pays et de ses forces vives, laisser la place à la négociation, arrêter de créer des commissions pour enterrer les problèmes, apprendre à composer et à cultiver la culture du compromis ».

Pour Maud Vergnol de L’Humanité, « afin de mettre en œuvre son programme de casse sociale, Emmanuel Macron sera obligé de composer avec la droite LR, seule force d’appoint disponible ».

« Les députés LR se retrouvent en position de force », estime aussi Laurent Bodin dans L’Alsace, pour qui « une forme inédite de cohabitation, à l’Assemblée nationale, débute ce lundi en France ».

« Même si elle est considérée comme un gros mot par les partis politiques, pourquoi pas la coalition ? », s’interroge même Sébastien Geroges de L’Est Républicain.

Dans Le Figaro, sous le titre « Saut dans l’inconnu », Alexis Brézet doute d' »un accord de coalition avec la droite, qui soudain retrouve un rôle inattendu? Encore faudrait-il que les macronistes l’assument, et que la droite l’accepte! (…) Emmanuel Macron le peut-il encore? Alors que sa succession est déjà dans les esprits, le risque n’a jamais été aussi grand pour lui de rester dans l’histoire comme le spectateur impuissant d’un quinquennat mort avant d’avoir commencé ».

« Le quinquennat qui s’ouvre ressemble à une terra incognita pour Emmanuel Macron », estime aussi Paul Quinio dans Libération. « Qui forcera celui-ci à composer, discuter, négocier. Et c’est peu de dire que le Président n’a pas excellé dans cet exercice depuis cinq ans, que ce soit avec les élus ou avec les corps intermédiaires ».

« Comment tout cela finira-t-il si la contestation ne parvient pas à se traduire en compromis ? » s’inquiète Florence Chédiotal dans La Montagne. « Si la France reste gouvernable, il est fort probable qu’en l’état elle ne soit plus réformable ».

« On va dans le mur », estime pour sa part Olivier Biscaye du Midi Libre pour qui « un sacré désordre se profile sans espoir de marche arrière ».

Dans la République du Centre-Ouest, Christophe Hérigault voit « les prémices d’une crise politique, voire institutionnelle si, pendant cinq ans, d’un projet de loi à l’autre, le gouvernement ne parvient pas à dégager des majorités de circonstance pour qu’aboutissent les promesses électorales du candidat Macron ».



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