Le procureur requiert des peines de prison et des mandats de dépôt à l’audience
Le procureur général près la cour d’appel d’Alger a requis, mercredi dernier, deux ans de prison ferme assortis de mandats de dépôt à l’audience contre des ex-employés de l’APN, notamment ceux qui sont en liberté provisoire, poursuivis dans une affaire de diffamation dont ont été victimes des cadres et fonctionnaires exerçant au sein de cette institution de souveraineté, à l’instar de la directrice du protocole, du directeur des finances et du directeur du personnel.
Le procureur général a, au cours de son réquisitoire, affirmé que « les faits reprochés aux inculpés sont formels et portent atteinte aux individus et personnes, et ce par la publication de propos diffamatoires et calomnieux visant des cadres et fonctionnaires dont l’image a été secouée par de graves allégations ».
Il a par ailleurs indiqué : « Si dans les autres pays la technologie de l’information est utilisée pour le développement des connaissances et l’évaluation des projets dans les différents domaines, dans notre pays, malheureusement, cette dernière est utilisée aux fins de salir l’image des personnes et de détruire les institutions de souveraineté, à l’instar de l’APN dont des cadres et fonctionnaires ont fait l’objet d’une sale campagne de la part de certains employés. »
Le procureur général a tenu à préciser que « ces derniers ont fait appel à un étudiant à la faculté des sciences juridiques et administratives qui, après avoir consulté ses complices, a ouvert une page sur Facebook intitulée « Espaces et secrets de l’APN » ».
Il a ajouté que sur cette page, les mis en cause ont porté atteinte à la dignité d’une femme qu’ils ont accusée d’être de mœurs légères, ont accusé un homme de corruption et enfin un autre d’entretenir une relation douteuse avec une femme.
Il a enfin souligné que « les inculpés ont usé de la même tactique, celle de nier l’intention de nuire aux victimes, et ce dans le but d’esquiver la responsabilité pénale qui leur incombe ».
Interrogés par le président de la première chambre pénale de la cour d’appel d’Alger, M. Omar Benkharchi, entouré du talentueux conseiller M. Kamel Hadj Mihoub et de Mme Zahia Kazzem, les inculpés, qui se sont succédé aux auditions, ont unanimement déclaré au juge, spécialisé en matière pénale et qui gère en même temps le tribunal criminel d’Alger, qu’ils n’avaient nullement l’intention d’attenter à l’honneur des plaignants. Ils ont clamé haut et fort : « En publiant ces informations, on n’a jamais pensé comparaître devant vos instances, monsieur le président ! ».
Appelé à la barre pour répondre aux graves accusations qui pèsent sur lui, le principal accusé, l’étudiant en droit, a répondu : « C’est vrai, monsieur le président, l’expertise, comme vous venez de le dire, a déterminé que je suis le propriétaire du compte. Je l’ai ouvert à la demande de l’inculpée qui exerce au niveau de l’APN en qualité de secrétaire. »
Même réponse d’un autre accusé exerçant en tant qu’assistant auprès du vice-président de l’APN. Il a pointé un doigt accusateur vers sa collègue répondant aux initiales de O.H. en soulignant : « M. le président, cette dernière est venue solliciter l’ouverture d’une page via Internet, me faisant croire qu’elle voulait créer un espace pour aider ses collègues en difficulté. Je lui ai répondu ne pas être en mesure de le faire. C’est elle qui a publié la page après avoir subtilisé mon mot de passe. Je ne suis concerné ni de près ni de loin dans cette affaire.
A la question de savoir quelle était la relation qui le liait à ses collègues injuriés, le mis en cause a répondu : « J’entretenais de bonnes relations avec eux. Je ne m’attendais pas à me retrouver dans une telle affaire. »
Le président a ensuite demandé aux victimes de se rapprocher l’une de l’autre pour donner leur version des faits et parler des préjudices qui leur ont été causés suite à la publication de ces propos diffamatoires.
La première personne entendue, la chargée du protocole du président de l’APN, a déclaré au président : « Ils m’ont tuée en publiant ces propos diffamatoires. Ces derniers m’ont créé beaucoup de problèmes avec ma famille, mes parents, mes frères et sœurs, mais aussi avec mes voisins.
Ils m’ont traitée de tous les noms et ont touché à ma dignité. La secrétaire mise en cause a publié sur la page que je pèse deux kilos ! Elle m’a même traitée de femme de mœurs légères ! Je ne lui ai pourtant rien fait, monsieur le président ! Je ne comprends pas pourquoi elle a agi de la sorte ! Vous savez, monsieur le président, même le président américain Barak Obama est au courant de mon affaire ! ».
Cette déclaration a mis en colère Me Miloud Brahimi, ancien bâtonnier et ancien président de la LADDH : « Nous sommes en Algérie et devant des juges algériens et elle nous parle d’Obama ! ».
Le deuxième plaignant, qui exerce en qualité de directeur du personnel, a d’emblée affirmé au président de l’audience que « le préjudice moral qui m’a été causé est énorme suite à la publication de ma photo sur Internet.
Depuis ce jour-là, mon épouse ne me fait plus confiance. J’ai beaucoup souffert. Si je demande un travail à l’étranger, par exemple, ils ne m’accepteront pas car le document 12 négatifs de Google ne s’efface pas ! Je n’arrive toujours pas à réaliser ce qui m’est arrivé ! C’est pourquoi je ne leur pardonnerai jamais ! »
Le dernier plaignant entendu a été le directeur des finances au niveau de l’APN. Il a déclaré : « Les mis en cause m’ont accusé d’avoir conclu des marchés publics de 13 milliards sans appels d’offres. Ils ont écrit « Boualem t’chippa et son gendre Lyès » ou encore « Boualem est un homme voleur et corrompu ! » ».
Les avocats de ces derniers se sont étalés et ont demandé des réparations matérielles de plus de cinq cent mille dinars.
Quant aux avocats de la défense, ils ont insisté sur l’application des articles ayant trait aux circonstances atténuantes.
Il convient de signaler que l’administration de l’APN, qui a déposé plainte, affirme que ces cadres ont été diffamés sur Facebook par d’autres employés. Ces derniers ont posté et publié des propos injurieux allant jusqu’à traiter les proches de l’actuel président de l’APN de voleurs et les accuser d’avoir usé de leurs postes pour détourner des sommes colossales dans des projets qui n’ont jamais vu le jour, en plus d’avoir déboursé plus de 13 milliards de centimes pour la rénovation de leurs biens privés !
L’affaire est mise en délibéré pour mercredi prochain.