Le décollage économique « nécessite des investissements solides »
L’accompagnement des entreprises productives et la promotion des exportations hors hydrocarbures est un principe fondamental de la nouvelle politique économique adoptée par les autorités du pays à même de concrétiser un décollage économique et de diminuer la facture des importations. C’est ce qu’a indiqué au Jeune Indépendant l’expert économique Elhaouari Tigharsi.
L’économie mondiale a traversé, depuis le début de la pandémie de la Covid-19, une grave récession suscitée par le cataclysme financier et l’effondrement de l’activité commerciale et industrielle dans le monde, rappelle M. Tigharsi, précisant que l’Algérie, qui connaît des effets indirects de cette crise, dispose de toutes les potentialités matérielles et humaines pour être un pays pivot en matière de développement dans la région.
Selon l’expert, un ancien député du FLN et ancien école des hautes études commerciales (EHEC) le décollage économique «tant souhaité par les pouvoirs publics» passe impérativement par un développement fondé sur une grande cohérence et une meilleure visibilité dans la politique économique de l’Etat, de façon à éviter une instabilité politique, juridique et sociale.
«Il est important d’adopter des règles de bonne gouvernance interne impliquant une politique socio-économique hors la rente pétrolière», qui en dépit d’un prix de baril propulsé par les événements en Ukraine, très bénéfique pour la trésorerie publique, demeure fragile et menace la stabilité du pays en cas de crise mondiale, comme ce fut le cas en 2020.
Selon l’économiste, libérer l’Algérie de sa dépendance aux hydrocarbures exige l’exécution de profondes transformations structurelles et d’ouvrir les perspectives pour les investissements en EPC+ (ingénierie, approvisionnement et construction + financement), porteurs de richesse et d’innovation.
«La concrétisation de solides réformes économiques et d’un modèle de développement en adéquation avec les spécificités du pays permettront d’édifier une économie moderne libérée de la dépendance aux hydrocarbures et de l’emprise de l’instabilité de leurs prix, ainsi que d’effacer les avatars d’une politique de développement basée exclusivement sur la rente pétrolière», ajoute M. Tigharsi.
Code de l’investissement … la clé de voûte
L’expert, qui insiste sur l’urgence de diversifier l’économie nationale pour diminuer sa dépendance aux hydrocarbures, met l’accent sur les contraintes bureaucratiques qui étouffent les investissements et la majorité des projets innovants. Pour attirer des capitaux et des investisseurs étrangers en Algérie, explique-t-il, il est primordial de créer un climat d’investissement propice aux affaires et basé sur des garanties de transparence.
Pour M. Tigharsi, le nouveau code d’investissement doit remédier à tous les manquements existant dans les précédents textes car «l’avenir du pays repose en grande partie sur les investissements nationaux et étrangers», qui se heurtent actuellement aux blocages de l’administration et notamment à une grande opacité dans les procédures.
L’élaboration d’une nouvelle loi sur l’investissement exige un débat élargi sur les défis auxquels l’Algérie est confrontée et sur les moyens de les relever, en passant par l’amélioration de la transparence des finances publiques.
Or, des entraves bureaucratiques, la corruption et le clanisme sont la sombre réalité qui enveloppe le climat d’investissement en Algérie. Des investisseurs locaux et étrangers font face à des lobbys, qui semblent avoir pour principale mission de faire fuir toute personne intègre voulant travailler pour le bien de ce pays.
«Une nouvelle loi sur l’investissement, impliquant tous les secteurs concernés, est une nécessité majeure, car la relance économique du pays est menacée par des pratiques archaïques, particulièrement la corruption et la bureaucratie», affirme l’expert.
«L’impasse dans laquelle se trouve l’économie algérienne requiert des textes plus flexibles, simples et attractifs, surtout dans le contexte actuel, accentué de crises économiques et politiques», explique M. Tigharsi.
Il fait savoir que «durant l’année 2019-2020, aucun investissement étranger n’a été réalisé, et beaucoup d’entraves ont freiné l’investissement local», relevant que faute d’un cadre juridique approprié, la crainte des investisseurs est compréhensible et tout à fait logique.
«Il n’incombe pas au ministre de l’Industrie de préparer, seul, une loi dont dépendent tous les autres secteurs et une partie importante de l’économie nationale», ajoute l’expert, expliquant qu’il s’agit d’un contrat économico-social qui a pour objet de fixer le régime applicable aux investissements nationaux et étrangers dans les activités économiques de production et de services.
«Tous les secteurs doivent participer à la préparation de cette loi, y compris les partenaires économiques et sociaux, sous l’égide du Premier ministre», précise-t-il. Dans ce sens, il appelle à instaurer un dialogue multisectoriel pour garantir la stabilité des textes de loi, seule qualité à même de rassurer les investisseurs.
«Nous ne voulons pas d’une loi semblable à celle de 2016. Comment peut-on s’ouvrir aux investisseurs étrangers sans renforcer l’attractivité de l’économie algérienne, et ce à travers une nouvelle stratégie industrielle qui permette d’encourager les investissements productifs et d’améliorer le climat des affaires», s’est interrogé l’expert.
M. Tigharsi plaide pour une loi accordant plus de garanties et de protection à l’investisseur, notamment étranger, à travers un cadre juridique transparent, clair et stable, permettant de réduire le rôle de l’administration dans le processus d’investissement ainsi que d’encourager et d’accompagner les porteurs de projets.