La répression galvanise la protestation
Ça ne décolère pas au sein des campus universitaires. Ce mercredi, les universités à l’échelle nationale ont observé une grève générale, en réaction à la désignation officielle de Abdelkader Bensalah comme chef de l’Etat pour une durée de trois mois. Pas que cette décision qui révolte la famille universitaire. Ce sont notamment les dépassements et les agissements violents de la part des agents de l’ordre public qui agacent le plus les étudiants et leurs enseignants, qui ont été avant-hier tabassés et brutalisés alors qu’ils marchaient pacifiquement à Alger-centre.
Des milliers d’étudiants ont encore déferlé dans la matinée d’hier sur le centre de la capitale pour contester le régime en place et surtout la violence exercée à l’encontre de la famille universitaire, censée être l’élite du pays. Un arsenal sécuritaire des plus impressionnants a été déployé le long des grands boulevards d’Alger. De la place du 1er Mai en passant par la rue Hassiba-Ben Bouali jusqu’à la Grande poste, tous les accès menant à Alger-centre ont connu un contrôle drastique pour minimiser le flux des manifestants. Malgré toutes les mesures de restriction, la mobilisation était très impressionnante, d’autant que plusieurs catégories sociales sont sorties dans la rue, à l’instar des syndicalistes du secteur de l’éducation.
A ce propos, Khaled, enseignant à l’université d’Alger 3, indique que « ce qui s’est passé hier est inadmissible. L’époque de la répression est révolue. C’est la violence exercée pendant les années passées, sous diverses formes, qui a fait que notre élite est effacée et dépourvue de sa force au sein de la société ».
« La liberté d’expression et de manifestation est un droit garanti par la Constitution. Depuis le 22 février, les étudiants, tout comme le peuple algérien en entier, retrouvent ce droit confisqué pendant des années », précise l’universitaire. Karima, étudiante à l’université de Bab Ezzouar, a par ailleurs dénoncé la violence pratiquée contre des étudiants qui manifestaient de manière pacifique et civilisée. « Nous sortons chaque mardi pour exprimer notre point de vue et débattre en compagnie de nos enseignants des questions en rapport avec l’actualité nationale et l’avenir de notre pays ». « Nous ne permettons à personne de nous priver de l’un de nos droits les plus élémentaires », tonne-t-elle. Les foules n’ont pas cessé de scander des slogans hostiles au pouvoir en place et à la politique d’intimidation exercée à l’encontre du peuple. Le départ de tout le gang est un des préalables pour amorcer la transition.
En plus de la grève, d’autres universités à Alger ont montré leur mécontentement en observant des sit-in au sein de leurs campus. C’est le cas de l’université de Dely Brahim, où des centaines d’étudiants se sont rassemblés devant l’entrée principale, brandissant une grande banderole et des pancartes : « El3ilm doun damir mahowa ila khereb lirouh » (le savoir sans conscience n’est qu’une destruction de l’âme) « echaâb youtalib bi mouhakemet el3issaba » ( le peuple demande le jugement de la bande)…
Fouad, quant à lui, a tenu à nous expliquer que « mes camarades et moi avons vu plus sensé de manifester dans notre université que de rejoindre les autres étudiants à Alger-centre, étant donné que les forces de l’ordre interceptent les bus transportant les étudiants ».
Somme toute, malgré le refus « catégorique » des acteurs désignés pour assurer la période de transition, la famille universitaire dans sa majorité s’accorde à dire que l’armée est le seul garant de la sécurité du peuple et devra jouer son rôle d’accompagnement pendant cette période. Un rôle qui se traduit notamment par la garantie concrète de la transparence du processus électoral et de la protection des richesses de ce pays.