La détention préventive assouplie et humanisée
La justice algérienne est-elle en train de faire un bond majeur dans sa quête de renouveau ?En plus de permettre désormais à l’avocat du détenu d’être présent à l’enquête préliminaire, elle a introduit des changements concernant la pratique de la détention préventive, trop longtemps utilisée par les magistrats en violation de la loi et des droits de l’homme.
La présence d’un avocat est nécessaire pour que les comportements des services de police changent à l’égard des citoyens.Le ministère de la Justice avait même instruit les magistrats d´éviter au maximum le recours au mandat de dépôt, en vain. Ce qui est, du point de vue de la loi, une mesure exceptionnelle, est devenu une règle absolue. Le droit des personnes sont souvent violés lors de garde à vue : injures, violences verbales et psychologiques exercées par des services de police et conditions déplorables de détention. La détention préventive, une pratique souvent utilisée abusivement par les magistrats qui, pour un oui pour un non, envoient n’importe quel citoyen en préventive, est aujourd’hui codifiée par le législateur algérien, une première depuis l’indépendance. Ainsi, l’ordonnance 15/02 du 23 juillet 2015 modifiant et complétant l’ordonnance 66/155 de 1966 est venue à point nommé réduire le recours abusif à la détention préventive et sa durée. Des prévenus ont même passé des années en préventive sans être jugés. Cet abus de pouvoir des magistrats vient d’être réglementé par une ordonnance qui précise, dans son article 124, que lorsque le maximum de la peine prévue par la loi est inférieur ou égal à trois ans d’emprisonnement, l’inculpé ; domicilié en Algérie ne peut être détenu autrement dit, il sera mis en examen, ressortira libre en attendant son procès. Dans les cas où l’infraction a entraîné mort d’homme ou causé un trouble manifeste de l’ordre public, la détention provisoire ne peut excéder une durée d’un mois non renouvelable. L’article 125 dispose, quant à lui, que dans les cas autres que ceux prévus par l’article 124, la détention provisoire ne peut excéder quatre mois en matière délictuelle. Lorsqu’il s’avère nécessaire de maintenir l’inculpé en détention, le juge d’instruction peut, après avis motivé du procureur de la République, prolonger par ordonnance motivée la détention provisoire une seule fois pour une durée de quatre (4) mois. Le nombre des détentions préventives a atteint 50 000, un chiffre exorbitant. « L´image de la justice algérienne est ternie par l´abus constaté dans les recours à la détention préventive », prévenait souvent Me Farouk Ksentini,le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l´homme (CNPPDH). Les nouveaux magistrats optent beaucoup plus pour la détention préventive.
Or, la détention provisoire (ou préventive) se définit comme une mesure de détention, généralement exceptionnelle, visant à emprisonner, jusqu´à la fin du procès, un accusé. Pourtant la loi offre plusieurs possibilités, entre autres la liberté provisoire, le contrôle judiciaire. En procédant à cette réforme, l’Algérie rejoint les pays avancés qui ont opéré des réformes profondes en la matière. La détention provisoire est marquée par la quête d’une conciliation certaine entre efficacité de la justice et atteinte aux libertés.