Intoxication au monoxyde de carbone : Le spectre plane sur les foyers  – Le Jeune Indépendant
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Nationale

Intoxication au monoxyde de carbone : Le spectre plane sur les foyers 

Intoxication au monoxyde de carbone : Le spectre plane sur les foyers 

C’est le début de l’automne et avec lui le retour des grandes pluies, des orages et, surtout, du froid. Mais pour beaucoup d’Algériens, c’est encore le spectre de la mort et les appréhensions sur ce poison inodore, incolore qui plane sur des milliers de foyers.

Chaque année, on dénombre de nombreux cas de décès liés à l’inhalation du monoxyde de carbone. Pas un jour ne passe sans que les services de la Protection civile annoncent des accidents dans ce cadre. La principale raison qui explique une telle situation est la prolifération d’appareils de chauffage défectueux sur le marché national. Des familles entières sont décimées par le « tueur silencieux » qui s’échappe insidieusement de ces appareils « bidon ».

Chaque année, de nombreux cas de décès liés à l’inhalation du monoxyde de carbone sont enregistrés. La prolifération d’appareils de chauffage défectueux sur le marché national est à l’origine de cette situation qui atteste de l’informel et de la contrefaçon, y compris au niveau du réseau de distribution assuré par des agents agréés. Des familles entières sont décimées par le « tueur silencieux » qui s’échappe insidieusement de ces appareils. Les propos de consommateurs recueillis par le Jeune Indépendant dans les rues d’Alger sont tous catégoriques sur la défaillance des appareils de chauffage. 

Attention aux matériels défectueux ! 

Une mère de famille a affirmé avoir acheté un chauffage neuf avec garantie et facturation à El-Hamiz. « Le jour où je devais l’installer, nous avons découvert qu’il était défectueux. Je l’ai changé le lendemain », a-t-elle confié. « Imaginez ce qui aurait pu arriver si je l’avais allumé. Nous serions aujourd’hui tous morts. C’est la raison pour laquelle j’invite les gens à faire très attention à ce qu’ils achètent », a-t-elle poursuivi. 

Un autre intervenant a affirmé que les appareils de chauffage sont, en Algérie, les produits qui sont le plus contrefaits à l’échelle mondiale car ils trouvent acquéreurs dans des pays où les moyens de contrôle font défaut et où l’informel bat son plein.  

Une autre personne a fait savoir que même si l’appareil est intact, il est impératif qu’il soit entretenu et révisé régulièrement, et cette opération doit se faire obligatoirement par un professionnel.

Des victimes à Tipasa et Cherchell

Le danger du monoxyde de carbone réside dans le fait que ce gaz prend la place de l’oxygène dans le sang. Une fois la personne intoxiquée, celle-ci risque une asphyxie et même une mort certaine si elle n’est pas secourue à temps. Le lieutenant Michalikh, chargé de la communication à la direction de la Protection civile de Tipasa, a indiqué qu’un homme âgé de 65 ans et sa mère âgée de 92 ans ont été découverts morts, dans leur domicile familial situé dans la commune de Bou-Ismaïl. « Nous les avons retrouvés à 10h10. L’homme était dans une chambre. Sa mère, quant à elle, a été découverte morte dans la salle de bain. Leur décès a été causé par le monoxyde de carbone émis par le chauffage et le chauffe-bain », a précisé l’officier.

Deux personnes résidant dans le quartier Sidi Abdelkader ont failli perdre la vie suite à l’inhalation du monoxyde de carbone d’un appareil de chauffage. Un cas similaire s’est produit durant la même année 2021 dans la ville de Cherchell, où deux personnes ont été sauvées de l’asphyxie. « Ce qu’il faut savoir, c’est que le monoxyde de carbone est un gaz hautement toxique qui, hélas, est indétectable car inodore et incolore », a prévenu le lieutenant Michalikh. « Pour éviter sa propagation dans un environnement clos, à l’instar des maisons, il faut prendre des précautions simples mais très efficaces. Il faut, entre autres, effectuer au minimum une fois par an un nettoyage (ramonage) des conduits et cheminées, avoir le réflexe d’aérer l’intérieur de l’habitat mais aussi respecter les consignes d’utilisation des appareils de chauffage, tout en les faisant vérifier, au moins une fois par an, par des professionnels », a-t-il conclu.

Pour rappel, selon le bilan de la Protection civile, vingt-huit personnes ont trouvé la mort et 557 autres ont été secourues suite à l’inhalation du monoxyde de carbone depuis le début du mois de janvier en cours à travers différentes wilayas du pays, a-t-on appris auprès du chef de la cellule de communication à la Direction générale de la Protection civile, Nassim Bernaoui. S’exprimant en marge du lancement, à Alger, de la campagne de sensibilisation aux risques du monoxyde de carbone, le capitaine Bernaoui a affirmé que « durant la période allant du 1er au 19 janvier 2021, 28 décès ont été déplorés et 557 personnes secourues à travers les différentes wilayas du pays suite à l’inhalation de ce gaz toxique ». Le même responsable a précisé que le bilan le plus lourd a été enregistré dans la wilaya de Tiaret (6 décès), suivie d’Alger (3), alors que deux décès ont été déplorés dans chacune des wilayas de Béjaïa, Djelfa, Mascara, Mila et Médéa ». M. Bernaoui a rappelé qu’« en 2020, 126 décès dus au monoxyde de carbone ont été signalés et quelque 2 247 personnes sauvées, à la faveur de 2 200 interventions effectuées par les éléments de la Protection civile ».

 Les campagnes de sensibilisation se multiplient

Détaillant les raisons de la hausse du nombre de victimes, le capitaine Bernaoui a évoqué la vague de froid qui a frappé l’année dernière le pays, obligeant les citoyens à utiliser les appareils de chauffage sans la moindre observation des mesures de prévention et d’aération, à l’origine de la fuite du gaz de monoxyde de carbone, un tueur silencieux et inodore, aussi bien que l’utilisation des chauffages traditionnels, des cuisinières et l’absence de contrôle et de maintenance des anciens instruments de chauffage. 

Le même responsable a rappelé « les campagnes de sensibilisation programmées par la Direction générale de la Protection civile, en coordination avec les différents partenaires dont la direction de Sonelgaz, l’Association des plombiers, la direction du commerce et l’Association de protection et orientation du consommateur et son environnement (APOCE) en vue de sensibiliser les citoyens aux dangers de la mauvaise utilisation de ses appareils et les inciter à procéder à leur contrôle et à leur maintenance ». Il a cité le lancement, le 14 novembre 2021, d’une campagne nationale de sensibilisation qui a duré jusqu’au 31 mars 2021, sur les précautions à prendre pour éviter l’asphyxie au gaz. 

Les imams des mosquées ont, de leur côté, consacré le prêche du vendredi à la sensibilisation des fidèles aux dangers de ce phénomène et à l’impératif de respecter les mesures de prévention afin d’éviter toute asphyxie au gaz. Selon le même responsable, tous les médias et les réseaux sociaux participent à l’opération de sensibilisation aux dangers de la mauvaise utilisation de ces appareils, outre la participation des établissements éducatifs à cet effort, et ce dans le souci de mettre la vie des citoyens à l’abri du danger des fuites de monoxyde de carbone.

Bernaoui a également insisté sur l’importance de renforcer le contrôle des chauffages en s’assurant de la conformité de ses appareils aux normes de sécurité, outre la prise de mesures nécessaires, à l’instar de l’aération et du contrôle permanent des appareils. Il convient de souligner qu’une instruction avait été donnée afin de rendre obligatoire l’accompagnement des appareils de détection de CO lors de la commercialisation des chauffages à gaz, et ce à partir du 1er novembre 2020 », a déclaré Malika Bouzenat, sous-directrice à la Direction générale du contrôle économique et de la répression des fraudes, au ministère du Commerce.

Le manque d’aération pointé du doigt

Selon le chargé de communication au sein de la DGPC de la wilaya d’Alger, le lieutenant Khaled Ben Khalfallah, le manque d’aération est à l’origine des intoxications au monoxyde de carbone. « L’absence d’aération est la cause principale de l’intoxication au monoxyde de carbone qui émane soit du chauffage, soit du chauffe-bain. Les gens sont calfeutrés chez eux, portes et fenêtres fermées.  

Il est également constaté l’absence de canalisation d’évacuation des gaz brûlés, surtout que la majorité des familles continuent de placer leur chauffe-bains dans les salles de bains », a-t-il souligné. Il a cité l’incident survenu l’année dernière, au cours duquel un jeune a perdu la vie. « Un jeune est resté dans sa voiture qu’il a garée dans le garage de la maison. Tout était fermé, alors le monoxyde de carbone s’est échappé du tuyau d’échappement du véhicule. Le jeune a inhalé le gaz, ce qui a causé sa mort », a-t-il déclaré. 

« Généralement, les chauffages sont utilisés à partir du mois de novembre jusqu’en février. L’appareil en question doit impérativement être entretenu par un professionnel avant son utilisation. « Ce dernier doit vérifier et entretenir l’appareil et son canal d’évacuation. Parce que des objets et même la poussière peuvent s’introduire à l’intérieur du chauffage et causer sa défaillance », a-t-il expliqué.

Ben Khalfallah a mis en avant la nécessité de vérifier également le tuyau d’alimentation en gaz qui relie l’installation à la ‘’tabouna’’ ou à la cuisinière. « Ce tuyau a une date limite d’utilisation. Si ce dernier dépasse cette date, il devient flexible et peut engendrer des fuites de gaz », a-t-il précisé.

« En janvier 2022, un couple avec leur nouveau-né ont trouvé la mort à Baba Hassen suite à la mauvaise installation d’un chauffage », a-t-il ajouté.

Dans le même ordre d’idées, M. Ben Khalfallah a évoqué le décès de quatre membres de la même famille, victimes de monoxyde de carbone. « Après avoir passé la journée à la plage, cette famille est rentrée pour se doucher. Il y a eu une coupure d’eau, alors elle a dû oublier le chauffe-bain en mode veilleuse. Une fois l’alimentation en eau rétablie, l’appareil a fonctionné toute la nuit, ce qui a engendré des fuites de gaz, entraînant le décès de toute cette famille », a-t-il indiqué. 

Ben Khalfallah a mis en garde contre les dangers du monoxyde de carbone, insistant sur la nécessité d’aérer pour endiguer ce tueur silencieux.

Les recommandations à suivre

Dans un communiqué, la Protection civile a appelé à la vigilance concernant les dangers du monoxyde de carbone, qui sont à l’origine d’intoxications parfois fatales, résultant d’une mauvaise utilisation des appareils de chauffage ou d’une absence d’aération dans les habitations, demeures et locaux. Selon les statiques établies par le même corps constitué, il a été enregistré, depuis le début de janvier 2021, 95 décès et plus de 2 006 personnes ont été secourues d’une mort certaine par les éléments de la Protection civile. « La prévention reste un moyen très efficace pour réduire les risques liés à ce type d’accident domestique », a noté le communiqué. Dans ce contexte, la DGPC a rappelé les conditions et les recommandations principales pour éviter les risques d’asphyxie au monoxyde de carbone. Il s’agit, a précisé encore la même source, de ventiler les logements lors de l’utilisation des appareils de chauffage, d’aérer au moins 10 minutes par jour, d’éviter de boucher les prises d’air dans les pièces, de ne pas laisser un moteur de voiture en route dans un garage fermé. Il est question également d’éviter l’usage de la ‘’tabouna’’ et des appareils de cuisson comme moyens de réchauffement et de faire procéder à l’entretien régulier des appareils par un professionnel.

L’instruction citée plus haut n’a pas été appliquée. Le tueur silencieux sévit toujours. Il faudrait qu’il y ait d’autres mesures plus draconiennes pour mettre fin à ce phénomène.

 

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