Inondations à Valence: Plusieurs « coupables » dans ce drame inédit
Le bilan des inondations qui ont frappé la ville de Valence dans le sud de l’Espagne faisant 207 morts ont suscités de nombreuses réactions notamment au sujet des mesures censées être prises pour prévenir ce désastre.
L’Espagne est sous le choc après cette catastrophe majeure alors que les journaux espagnols qui retracent le déroulé de la journée de mardi et s’interrogent sur les causes de la catastrophe. Les autorités locales ont été critiquées pour n’avoir pas émis à temps des avertissements sur les dangers potentiels de la tempête.
Le gouvernement de Valence a admis qu’il n’avait envoyé des SMS avertissant les habitants de la catastrophe que huit heures après que les inondations ont été signalées et dix heures après que l’AEMET a émis un avertissement de « danger extrême » dans la région.
Ce bref message envoyé juste après 20 heures mardi est arrivé trop tard pour de nombreuses personnes qui étaient déjà bloquées chez elles, dans des magasins ou dans leur voiture dans les rues au moment où les inondations meurtrières ont frappé.
L’Aemet avait émis dès mardi matin une « alerte rouge » pour la région de Valence, appelant à une « grande prudence » face à un danger « extrême ». Mais le service de Protection civile n’a envoyé qu’après 20 h son message d’alerte téléphonique invitant les habitants à ne pas sortir de chez eux.
L’heure à laquelle elles ont eu lieu ces inondations a contribué à alourdir le bilan des victimes. Le gros de la pluie est, en effet, tombé en fin de journée, à un moment où beaucoup d’habitants se trouvaient sur la route.
Selon les autorités, de nombreuses victimes sont ainsi mortes dans leur voiture, surprises par la montée des eaux alors qu’elles rentraient chez elles, ou dans la rue, après avoir tenté de grimper aux arbres ou bien aux lampadaires.
Une situation qui aurait pu être évitée si ces personnes avaient été mises en garde en temps et en heure pour leur permettre de rentrer plus tôt chez elles, estiment les médias locaux.
Le manque de prudence de certains habitants est aussi mis en cause. Plusieurs ont ainsi admis être sortis malgré l’alerte, expliquant n’avoir pas pris conscience de la gravité de la situation, en évoquant des alertes trop fréquentes.
Selon l’agence météorologique espagnole (Aemet), il est tombé dans certaines localités l’équivalent « d’une année de précipitations », en quelques heures seulement. À Chiva, à l’ouest de Valence, l’agence a ainsi relevé pas moins de 491 litres de pluie par mètre carré (49,1 cm).
Ce déluge – lié à un phénomène de « goutte froide », une dépression isolée en altitude assez fréquente à cette époque de l’année – a été tel qu’il a fait sortir de leur lit plusieurs rivières et entraîné la formation subite d’énormes torrents de boue.
La violence des inondations s’explique aussi par la présence de sols secs dans les zones affectées, l’Espagne ayant connu ces deux dernières années des sécheresses intenses. Cela a favorisé un phénomène de ruissellement, la terre se montrant incapable d’absorber toute cette eau.
Par ailleurs, la région de Valence, la plus touchée par les inondations, se caractérise par de nombreuses zones artificialisées, où les espaces naturels ont cédé la place au béton, totalement imperméable.
Il y a eu « une urbanisation incontrôlée et mal adaptée aux caractéristiques naturelles du territoire » ces dernières années, qui aujourd’hui « amplifie » les risques, souligne Pablo Aznar, chercheur à l’Observatoire socioéconomique des inondations et de la sécheresse (OBSIS).
Les précipitations sont tombées sur des zones fortement peuplées et ont donc affecté mécaniquement un grand nombre de personnes. L’aire métropolitaine de Valence (sud-est), où ont eu lieu la très grande majorité des décès, compte ainsi 1,87 million d’habitants. Il s’agit de la troisième plus grande ville d’Espagne.
La densité urbaine « est un facteur très important » pour expliquer l’impact de ces inondations, souligne Pablo Aznar, pour qui la préparation des villes aux catastrophes climatiques constitue un « défi » pour les autorités.
Pour beaucoup d’Espagnols, la conjonction de ces pluies diluviennes et de mauvaises décisions en matière d’aménagement du territoire qui ont mené à une catastrophe de si grande ampleur.