Gourdel : l’étrange rapt
Quelques heures à peine après avoir débarqué en Algérie en provenance du Maroc, il se fait kidnapper sur les hauteurs de Tikjda. Il serait arrivé en Algérie avec un autre homme de la région lilloise qui connaissait très bien les lieux.
Le jour de son enlèvement, Hervé Gourdel avait eu des contacts avec sa famille : « Nous avons pu le joindre au téléphone hier après-midi », explique sa mère à L’Express.
« Tout allait bien. Il nous a dit qu’il entamait une randonnée de deux jours et qu’il serait peut-être difficilement joignable. Ensuite, il comptait ouvrir une nouvelle voie dans le massif. » Une nouvelle voie pour quelqu’un qui ne connaissait pas les lieux.
L’otage français a-t-il été victime d’un guet-apens ? Ses ravisseurs étaient-ils au courant de sa présence dans ces lieux ou a-t-il été livré ? Comment a-t-il pu faire confiance à des personnes qui s’autoproclamaient guides de montagne au lieu de passer par un circuit de professionnels des montagnes algériens qui sont pourtant reconnus sur le plan international.
Selon un guide chevronné, cette région est difficile d’accès et dangereuse aussi du fait de la présence de groupes terroristes qui écument la région depuis des années. Avait-il mesuré tous les risques en venant en Algérie ? Ou s’agit-il, comme le laissent croire certains médias d’une fort improbable coïncidence.
En tout état de cause, ce kidnapping est sujet à beaucoup de questions. Selon son père, interrogé par le journal régional Nice Matin, Gourdel a été enlevé en compagnie d’au moins trois Algériens qui se trouvaient avec lui. « Ils étaient au moins trois à l’accueillir et ils l’ont emmené dans la montagne, dans un chalet », raconte le père. « Et là il y a des gars qui se sont amenés et qui ont emmené tout le monde.
Au bout d’un certain temps ils ont relâché les Algériens et n’ont gardé qu’Hervé », précise-t-il. Le lieu exact du rapt reste un mystère tout comme les « accompagnateurs », introuvables depuis avant-hier par les services de sécurité. La région d’Aït Ouabane et de Saharidj (Bouira) à Ouacif (Tizi-Ouzou) en passant derrière le site de Tikjda, est devenue l’axe à travers lequel se déplacent généralement les groupes terroristes.
Les éléments de l’Armée Nationale Populaire (ANP) passaient hier au peigne fin un important périmètre en zone montagneuse situé entre les wilayas de Bouira et Tizi Ouzou, pour tenter de localiser Gourdel, aux mains d’un groupuscule baptisé « Djound al khilafa » (les soldats du califat) inconnu jusqu’à ce qu’il prête allégeance à l’État islamique il y a quelques jours. Des troupes d’élite du service de lutte antiterroriste participaient à cette opération de grande envergure, qui a vu l’utilisation d’importants moyens aériens ainsi que terrestres.
Plus de 1 500 soldats à sa recherche
Plus de 1 500 soldats de l’ANP participeraient aux recherches pour retrouver Gourdel. Les opérations sont supervisées sur place par les chefs de secteurs opérationnels de l’armée à Bouira.
Le commandant de la Gendarmerie nationale, le général major Boustila Ahmed, s’est rendu par hélicoptère sur les lieux où un poste de coordination des recherches a été installé pour tenter de localiser le lieu de retranchement des ravisseurs avec leur otage.
Sur une vidéo diffusée sur Youtube puis retirée, on peut apercevoir l’otage français au milieu de deux de ses ravisseurs.
L’un des membres de l’organisation prend d’abord la parole. Il déclare qu’il donne 24 heures au président François Hollande pour mettre un terme aux attaques aériennes contre Daech en Irak, sous peine d’égorger l’otage français. Ensuite c’est au tour d’Hervé Gourdel de prendre la parole. Il se présente. « Je suis né à Nice, en France. Je suis guide de haute montagne.
Je suis arrivé en Algérie le 20 septembre 2014 et je suis depuis hier (21 septembre) aux mains d’un groupe armé, commandé par Djound-al-khilafah. »
Il interpelle ensuite le président François Hollande : « Ce groupe armé me demande de vous faire la demande de ne pas intervenir en Irak. Il me retient en otage. Je vous conjure Monsieur le Président de faire tout ce qui est en votre pouvoir pour me sortir de ce mauvais pas. » La France ne négociera pas avec le groupe terroriste auteur du kidnapping selon Manuel Valls, Premier ministre français. S’exprimant dans une interview accordée à la radio française Europe 1, Valls a indiqué qu’il n’y aura « aucune discussion » et « aucune négociation ». « Si on cède, si on recule d’un pouce, on donne cette victoire », a-t-il dit.
Du côté algérien, le ministère de l’Intérieur a indiqué dans un communiqué que « des individus ont intercepté, hier soir le 21 septembre 2014 à 21h00, à hauteur du village d’Ait Ouabane commune d’Akbil, (wilaya de Tizi Ouzou), un véhicule ayant à son bord un groupe d’algériens accompagnés du ressortissant français Gourdel Hervé Pierre », précisant qu’il était hébergé depuis son arrivée à l’aéroport international d’Alger, le 20 septembre 2014, dans un chalet proche du complexe de Tikjda (wilaya de Bouira).
Les assaillants, après avoir libéré ses compagnons algériens et abandonné le véhicule sur les lieux, ont gardé le ressortissant français et pris la fuite vers une direction inconnue », poursuit la même source, qui affirme que les recherches aussitôt engagées par les services de sécurité « sont toujours en cours « . Par ailleurs, les services de sécurité semblent avoir identifié le terroriste à l’origine du kidnapping.
« Les premières investigations ont révélé que l’auteur du kidnapping était le terroriste Abdelmalek Gouri surnommé Khaled Abou Slimane », chef du groupe « El Houda » ayant fait scission avec Aqmi pour prêter allégeance à Daech.
Les services de sécurité ont « repéré » ses récents déplacements dans la région où le ressortissant français a été kidnappé. Agé de 37 ans et originaire du village de Boudahr (Si Mustapha) à Boumerdès, l’homme a rejoint le maquis, depuis des années, après avoir été emprisonné pendant cinq ans à Tizi Ouzou pour soutien aux groupes terroristes.