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Nationale

Enseignement hybride : Quel bilan après une année ?

Enseignement hybride : Quel bilan après une année ?

Introduit dans le système d’enseignement à titre exceptionnel dans les établissements universitaires lors de l’année universitaire 2020-2021, l’enseignement hybride (en présentiel et en distanciel) est en passe de devenir permanant. Après une année de l’adoption de ce mode d’enseignement, l’heure est au bilan.

La crise sanitaire du coronavirus a amené une profonde transformation de la pédagogie. Enseignants et étudiants ont été amenés à adopter un nouveau rythme et de nouvelles méthodes. Des enseignants estiment que le format en présentiel reste leur format préféré, d’autant qu’on n’est pas encore prêt à adopter le mode d’enseignement à distance comme il se doit. Ils témoignent de leurs expériences.

Rien ne peut remplacer le présentiel !

«Théoriquement, le mode d’enseignement hybride est bien, à condition que tout le monde joue le jeu», nous fait savoir Boukhalfa Chouikrat, enseignant à l’Ecole nationale supérieure de journalisme et des sciences de l’information d’Alger, signalant le manque d’assiduité chez certains étudiants. «Certains sont souvent absents et ne participent pas. L’évaluation reste difficile à faire», a-t-il ajouté, relevant les difficultés signalées par les étudiants qui n’ont pas accès à un ordinateur et au réseau Internet. Le constat est partagé par son collègue, Mourad Zeggane, qui affirme que le maintien de l’enseignement en distanciel est une décision ministérielle. Selon lui, il y a eu beaucoup de dysfonctionnements dans l’application de l’enseignement en ligne, comme c’est d’ailleurs le cas dans certains pays européens. L’évaluation reste le point noir de cette technique d’enseignement, surtout qu’il nous a été demandé de renoncer à certains principes fondamentaux, comme ne pas appliquer de note éliminatoire et ne pas prendre en considération les absences des étudiants.

«On est très loin de la mise en œuvre effective de ce mode d’apprentissage. C’est la triste vérité», a répondu un enseignant à la faculté des sciences de l’information et de la communication à l’université de Béjaïa lorsqu’il lui a été demandé si l’enseignement supérieur était prêt à adopter l’enseignement en ligne d’une manière permanente. Selon lui, «c’est une mauvaise expérience». Il affirme que «la crise sanitaire a révélé le fossé qui nous sépare avec ce mode d’enseignement que les officiels ne cessent de louer».

Il estime que ce mode d’enseignement, appelé «hybride», se résume en la mise en ligne des supports PDF, word, Slides… et rarement des vidéos, sans plus. Il indique qu’il n’y a pas réellement eu un enseignement en ligne. «Dans mon environnement immédiat, personne parmi mes collègues n’a eu recours à des conférences en ligne ou des évaluations en ligne au sens propre du terme, avec réglage de chronomètre et réponse en direct…», précise-t-il. L’enseignant affirme cependant que ce n’est pas par manque de volonté. «Soyons raisonnable. Avec les conditions actuelles, nous sommes dans l’impossibilité d’adopter correctement ce mode d’enseignement», souligne l’enseignant, qui estime que celui-ci a, au contraire, empiré les choses. «Rien ne peut remplacer le présentiel, surtout pour ce qui est de l’interactivité», fait-il savoir, relevant les inconvénients de ce système. «A distance, l’étudiant se perd. Pis encore, on encourage l’étudiant à tricher. Pour preuve, on reçoit, lors des évaluations, les mêmes réponses sur plusieurs copies», précise-t-il, affirmant que l’important ce n’est pas «l’avancement des cours», comme cela est souligné dans les discours officiels. L’enseignant est catégorique : «Ce mode d’enseignement « à l’algérienne » généralise le plagiat et ne protège pas les méritants.»

Pas encore prêts à adopter l’enseignement à distance

Karim Yamoun, enseignant à la faculté des sciences économiques à l’université Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou, ne rejette pas l’enseignement à distance en bloc. Ce mode d’enseignement a, selon lui, beaucoup d’avantages, mais en Algérie, on n’est pas encore prêts à l’adopter. «On n’est aucunement prêts à appliquer réellement ce mode d’enseignement», répond-il à la possibilité d’adopter à titre permanant ce système, comme cela a été annoncé par le ministre de l’Enseignement supérieur. «Du point de vue du savoir-faire, de la disponibilité des moyens, on n’a pas encore atteint le seuil d’applicabilité», estime-t-il, affirmant qu’il y a beaucoup de choses à dire sur le cas algérien. «Outre le problème d’accès au réseau Internet et son débit, les enseignants et les étudiants ne sont pas initiés à ce genre d’enseignement», fait-il remarquer.

Chose qui nécessite, principalement, un effort énorme de formation à la maîtrise des TIC, mais aussi l’accès à un ordinateur et à l’Internet. A cela s’ajoute la résistance de certains enseignants plus âgés qui, à défaut de notions en informatique, auront d’énormes difficultés à s’adapter à ce mode d’enseignement s’il venait à être généralisé, ajoute-t-il. Le professeur en économie fait la comparaison entre ce mode d’enseignement dans l’absolu et celui dans la réalité du terrain.

Pour lui, et dans l’absolu, il permet à l’étudiant d’avoir plus d’actions dans la gestion de sa formation, notamment dans le fait de gérer son rythme dans certaines activités pédagogiques. Pour l’enseignant, cela permet l’introduction de nouvelles méthodes multimédia à même d’améliorer le contenu de son cours. Plus encore, l’enseignement à distance, caractérisé par l’utilisation exclusive de l’outil informatique, permettra notamment à l’enseignant de mieux contrôler l’accès des étudiants aux cours et aux différents tests.

Cependant, note-t-il, les choses ne se passent pas ainsi sur le terrain. «L’introduction de l’enseignement en ligne en soutien à l’enseignement présentiel est une bonne chose. Mais son application nécessite la mise en œuvre de beaucoup de moyens manquants », affirme M. Yamoun, qui cite l’exemple des plates-formes e-learning des universités qui «ne sont pas vraiment performantes». «Il y a des bugs. Elles sont souvent surchargées, avec un nombre maximal de personnes qui peuvent se connecter en même temps», explique-t-il.

Ça se prépare au ministère de l’Enseignement supérieur

Du côté du département d’Abdelbaki Benziane, la question est tranchée. Le ministre avait annoncé, le mois de mars dernier, l’adoption «à titre permanent», dès l’année prochaine, du mode d’enseignement hybride dans le système national d’enseignement supérieur. «L’expérience de l’enseignement hybride, en présentiel et en distanciel, introduit à titre exceptionnel dans les établissements universitaires lors de la rentrée 2020-2021 pour cause de Covid-19, constitue une opportunité pour l’adoption de ce mode d’enseignement à titre permanent dans le système national d’enseignement supérieur», avait-il alors déclaré.

Le travail a déjà commencé au niveau de la tutelle. Le ministre avait affirmé que les textes législatifs et réglementaires régissant ce mode d’enseignement hybride étaient en cours d’élaboration, signalant que son département était en train de réunir les moyens matériels et techniques pour mener à bien l’opération, outre l’élaboration du cahier des charges pour l’acquisition d’une plate-forme numérique nationale de télé-enseignement moderne.



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