Enseignement de l’anglais au primaire : la grande question

C’est une course contre la montre pour le ministère de l’Education nationale qui doit assurer une bonne préparation à l’enseignement de l’anglais aux classes de 3e année primaire, et ce dès cette année scolaire. Entre l’élaboration du programme, la conception des livres et le recrutement des enseignants, le département de Belabed sera-t-il en mesure de relever le défi ?

Moins d’un mois nous sépare de la rentrée scolaire 2022-2023 et toutes les mesures ont été prises pour relever le défi et assurer un enseignement de la langue de Shakespeare au primaire, a assuré le ministre de l’Education nationale. Cette fois-ci, l’enseignement de cette langue au cycle primaire se précise.

Le département de Abdelhakim Belabed est sur le point de procéder au recrutement de plus de 5 000 enseignants contractuels pour enseigner l’anglais aux élèves de la troisième année primaire, a annoncé Boualem Benlaouar, inspecteur à l’Inspection générale du ministère de l’Education nationale. Un nombre, selon les syndicats du secteur, qui « est très loin de pouvoir couvrir les besoins de plus de 20 000 écoles primaires, réparties sur tout le territoire national ».

En effet, depuis le début du mois d’août, le recrutement des enseignants se fait en masse. Il s’agit essentiellement de licenciés de langue anglaise mais aussi de licenciés en interprétariat et traduction. Plus de 60 000 dossiers de candidature à ces postes ont été réceptionnés par les services compétents du ministère de tutelle, a précisé la même source. Le tri a été fait via une plate-forme numérique « pour assurer la transparence et l’égalité des chances d’accès à ces emplois ». 

Le ministre Belabed s’est dit, pour sa part, prêt à relever le défi et faire aboutir ce projet. Malgré toutes ces assurances, les syndicats du secteur se montrent sceptiques et ne cachent pas leurs craintes quant à la réussite de ce projet. 

Pour le syndicaliste et pédagogue Bachir Hakem, l’introduction de l’enseignement de l’anglais au cycle primaire dès cette rentrée scolaire, c’est de la pure « improvisation ». C’est une décision qui s’est faite sans qu’aucune étude ne soit faite au préalable. Dans une déclaration au Jeune Indépendant, le syndicaliste a estimé que pour généraliser cette décision, il faudrait d’abord en avoir les moyens. « Pour pouvoir enseigner l’anglais sur de bonnes bases, il faut d’abord avoir les moyens logistiques, préparer l’élève, les programmes et former les enseignants pour l’enseignement de cette langue », a-t-il indiqué. 

Hakem s’est étonné de la manière dont se fait le recrutement des enseignants, la qualifiant d’« embauche de manœuvres ». Selon lui, il faudrait que les enseignants recrutés soient déjà formés, notamment sur le plan pédagogique.

Le secrétaire général du Satef, Boualem Amoura, avait auparavant déclaré que « vouloir intégrer cette langue dans le programme du primaire demande du temps, des moyens et les outils pédagogiques adéquats, lesquels seront difficiles à mettre à la disposition du système éducatif ». Cela nécessite, selon lui, le recrutement de pas moins de 20 000 enseignants, ce qui est impossible. Selon le syndicaliste, le pays compte plus de 20 000 écoles primaires. « Si chaque école recrute deux enseignants, le cycle primaire aura besoin de 40 000 enseignants pour garantir l’enseignement à tous les élèves », a-t-il fait savoir.

Concernant les modalités de recrutement, le représentant du ministère de l’Education a fait savoir que les candidats seront classés automatiquement selon le critère d’ancienneté du diplôme et en cas de candidats ex-aequo, le plus âgé sera retenu. Les candidats sélectionnés se verront remettre une nomination en tant qu’enseignants contractuels au primaire et seront convoqués entre les 4 et 6 septembre en fonction du nombre de postes ouverts dans la commune, et ce pour une formation préparatoire.

Cette formation est obligatoire et s’étalera du 8 au 19 septembre prochain. Après cela, les enseignants devront enseigner dans plusieurs écoles en même temps, selon un calendrier serré. M. Benlaouar a expliqué que l’attribution des postes se fera après le comptage du nombre total de postes ouverts dans la municipalité. Les candidats seront alors affectés en fonction du nombre d’écoles primaires présentes dans la région.

A cet égard, le même responsable a rappelé les critères de sélection des professeurs à ce poste, dont le plus important est le fait d’être titulaire d’une licence en langue anglaise ou en traduction de et vers l’anglais, soulignant que le ministère a commencé à recevoir les candidatures à ces postes de la fin juillet au 30 août. Concernant le manuel scolaire d’anglais, l’inspecteur central du ministère de l’Education a confirmé qu’il est en phase finale d’impression et qu’il sera distribué prochainement.