Dialogue intermalien: La réconciliation l’emporte
Pari tenu dimanche 1er mars à l’hôtel Aurassi à Alger, où toute l’équipe de la médiation, les parties maliennes en négociations, le corps diplomatique en poste à Alger et quelques invités ont pu assister, en présence de la presse, à la cérémonie du paraphe de l’ « accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger ».
Ambiance bon enfant et lecture de discours reconnaissants à l’endroit des médiateurs, dont l’Algérie, chef de file. Avec un hiatus tout de même : la coordination des mouvements de l’Azawad n’a pas paraphé ledit document, demandant un délai pour s’en aller consulter sa base.
Aux côtés du ministre des Affaires étrangères algérien Ramtane Lamamra, les représentants de la CEDEAO, de l’UA, de l’UE, de l’Organisation de la coopération islamique, du Burkina Faso, de la Mauritanie, du Niger, du Nigeria et du Tchad, sans oublier les émissaires de l’ONU, prennent place pour une tribune complète de la médiation.
L’introduction de Ramtane Lamamra va droit au but. Le processus a été long, laborieux mais a fini par aboutir. Les objectifs sont rappelés. Des propos inscrits dans la déclaration solennelle de la Médiation : « Cet accord a été le fruit d’une négociation longue et intense menée dans le cadre du Processus d’Alger entre les parties prenantes maliennes pour parvenir à une solution globale et définitive au conflit qui affecte dangereusement le Septentrion malien, déstabilise le Mali et menace la paix et la sécurité dans l’ensemble de la sous-région. »
Paraphe et abstention
Sans plus tarder on en vient au moment solennel du paraphe où les représentants des différentes parties, gouvernement malien, groupes politico-militaires, membre de la Médiation et « témoins » apposent leur paraphe au bas du document de 32 pages. Les flashs et l’effervescence ne couvrent cependant pas un autre événement.
Celui de l’abstention de la Coordination des mouvements de l’Azawad qui, comme annoncé dans sa déclaration remise à la presse, « demande à la médiation internationale de lui accorder le temps et le soutien nécessaires pour partager, de bonne foi, le projet d’accord avec les populations de l’Azawad dans un délai raisonnable avant tout paraphe ».
Message poli mais ferme dans lequel on peut lire, en filigrane, les craintes de représentants politiques du MNLA, entre autres, de parapher un document en deçà des revendications qu’ils portaient au départ. D’ailleurs, dans les coulisses, les membres de la Coordination ne manquent pas de faire part des réactions négatives de la base dans l’Azawad. « Des marches de protestation, des menaces à notre encontre si nous venions à parapher l’accord. Un accord qui a été brûlé symboliquement… »
Malaise
Les négociateurs seraient donc otages du radicalisme affiché au cours des discussions pendant les différents rounds du processus d’Alger. Une surenchère aux accents tantôt fédéralistes, tantôt autonomistes. Tactique de négociations risquée qui met la coordination en porte-à-faux avec le reste des mouvements du nord du Mali en marche pour une paix durable.
Le malaise était évident, même si les médiateurs et à leur tête, le MAE algérien, Ramtane Lamamra, ont fait preuve de compréhension, en acceptant d’attendre- le chef de la diplomatie a réitéré sa patience à travers la métaphore sur la caravane des hommes du grand sud « qui sait attendre le dromadaire le plus lent » au nom de la solidarité, de la fraternité et de la cohésion sociale.
Au niveau de la délégation gouvernementale malienne, la déception était aussi perceptible, mais chacun a fait preuve de retenue pour apprécier dans la communion l’avancée des pourparlers.
Un officiel malien qui a requis l’anonymat va jusqu’à citer, sans ironie, la chute du texte de la Coordination : « La coordination rassure la communauté internationale et les Etats membres de la Médiation que sa démarche vise à donner toutes les chances de réussite au processus d’Alger pour aboutir à un accord de paix durable… n’insultons donc pas l’avenir et attendons le MNLA et consorts, ils finiront par parapher ce document et signer un accord durable ». Une manière fair-play d’accuser le coup et de déclarer que le dialogue l’a emporté. Nous y reviendrons.