Crise au Sénégal suite au report de la présidentielle

Le chef de l’État sénégalais Macky Sall a annoncé samedi avoir abrogé un décret fixant au 25 février 2024 la date de la présidentielle, après la mise en place d’une commission parlementaire enquêtant sur deux juges du Conseil constitutionnel, dont l’intégrité dans le processus électoral est contestée.
« J’ai signé le décret du 3 février 2024 abrogeant le décret » du 26 novembre 2023, fixant la présidentielle au 25 février 2024, a-t-il expliqué dans son discours à la Nation, à quelques heures de l’ouverture de la campagne électorale pour le scrutin présidentiel pour lequel devaient concourir vingt candidats, sans deux ténors de l’opposition. « J’engagerai un dialogue national ouvert, afin de réunir les conditions d’une élection libre, transparente et inclusive », a-t-il ajouté, sans donner de date.
Contexte de grave crise politique
Le président Sall avait promis fin décembre de remettre début avril le pouvoir au président élu à l’issue du scrutin et l’a réitéré plusieurs fois. Élu en 2012 pour sept ans et réélu en 2019 pour cinq ans, il avait annoncé en juillet 2023 ne pas être candidat à un nouveau mandat.
Il a alors désigné comme dauphin, en septembre, le Premier ministre Amadou Bâ, un responsable du parti présidentiel. Le Conseil constitutionnel a exclu du scrutin des dizaines de prétendants.
Parmi eux, deux ténors de l’opposition : le candidat antisystème Ousmane Sonko, en prison depuis juillet 2023 notamment pour appel à l’insurrection, disqualifié par le Conseil à la suite d’une condamnation pour diffamation dans un dossier distinct ; et Karim Wade, ministre et fils de l’ex-président Abdoulaye Wade (2000-2012).
L’opposition se mobilise
Rejetant la décision du président Macky Sall, l’opposition au Sénégal a appellé à des manifestations dimanche à Dakar qui ont été réprimées par la police.
L’opposant sénégalais Khalifa Sall, un des principaux candidats à la présidentielle, a notamment appelé samedi tout le pays à « se lever » contre le report du scrutin.
L’annonce faite samedi dans un contexte de grave crise politique a aussi provoqué l’inquiétude à l’étranger. Elle plonge à nouveau dans l’inconnu ce pays réputé comme un îlot de stabilité en Afrique, mais qui a connu depuis 2021 différents épisodes de troubles meurtriers.
Les États-Unis sont « profondément préoccupés » par l’annonce du président Sall, a fait savoir samedi le département d’État sur le réseau social X. « Nous exhortons tous les participants au processus électoral sénégalais à s’engager pacifiquement dans l’effort important visant à fixer rapidement une nouvelle date et les conditions d’une élection libre et équitable », a-t-il écrit.
La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest a également exprimé son « inquiétude » et demandé dans un communiqué aux autorités d’œuvrer à fixer rapidement une nouvelle date.
Selon le code électoral, un décret fixant la date d’une nouvelle présidentielle doit être publié au plus tard 80 jours avant le scrutin, ce qui mènerait à fin avril dans le meilleur des cas. Une situation quasiment impossible. Le président Sall risque ainsi d’être encore à son poste au-delà de l’échéance de son mandat, le 2 avril.
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