Compléments alimentaires : une vente anarchique
En l’absence d’une réglementation encadrant le marché des compléments alimentaires, en comparaison avec celui des médicaments, ces substances dites à effet nutritionnel envahissent les étalages des pharmacies, des grandes surfaces et les sites de vente en ligne, loin de tout contrôle, notamment en ces temps de Covid-19.
La consommation des compléments alimentaires connaît un boom depuis quelques années en Algérie. Et suite à la pandémie de Covid-19 qui sévit actuellement partout dans le monde, les consommateurs sont tentés de faire une cure de vitamines et d’autres compléments alimentaires pour booster leur système immunitaire et se prémunir du virus. Appliquer les gestes barrière en attendant un vaccin, c’est le réflexe de base pour limiter la propagation de l’épidémie. Mais des chercheurs viennent de mettre en avant l’importance et le rôle clé de la nutrition dans la lutte contre la Covid-19. Les consommateurs algériens jugent que leur alimentation est déséquilibrée et appauvrie en nutriments. Aussi, ils ont décidé de se tourner vers des compléments alimentaires pour améliorer leur bien-être. Malheureusement, une grande majorité de personnes tombent dans le piège et se laissent influencées par toute une stratégie de communication sur les produits, vantant leurs allégations de santé et les moyens auxquels leurs concepteurs ont recours. Les produits sont présentés comme des solutions miracles, du petit maux aux grand problèmes de santé tels que les maladies articulaires, le diabète, l’Alzheimer, etc. Cela se fait chez nous au moment où, partout dans le monde, des appels sont lancés pour un retour à l’alimentation bio, équilibrée et riche en fruits et légumes.
Un marché lucratif en pleine expansion
Ce marché lucratif profite, en effet, aux industries pharmaceutiques qui usent de tous les moyens pour convaincre le grand public ou le consommateur algérien à se tourner vers ces compléments alimentaires pour son bien-être. En effet, des spots publicitaires vantant leur rôle dans le renforcement de l’immunité sont diffusés à longueur de journées, loin de tout contrôle. Ces fabricants de compléments alimentaires ont recours aussi aux réseaux sociaux et aux influenceurs et influenceuses, regrette le Pr Mekacher Lamine Redouane, pharmacien toxicologue, soulignant que, comme pour les médicaments, la promotion de produits portant des allégations de santé doit être destinée au professionnel de la santé et non au grand public. «Aujourd’hui, la publicité pour les compléments alimentaires n’est pas soumise à la réglementation applicable aux médicaments en vente libre», a-t-il déploré.
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Contacté par le Jeune Indépendant, le Pr Redouane Mekacher insiste sur la nécessité d’adopter une alimentation équilibrée. Selon lui, «les gens devraient plutôt chercher à obtenir leurs nutriments à partir d’une alimentation bénéfique parce que les données montrent que la majorité des adultes en bonne santé n’ont pas besoin de prendre de compléments alimentaires, comme les sportifs de haut niveau», a-t-il précisé, invitant tout citoyen à adopter une hygiène de vie et à suivre comme exemple les ancêtres. Cependant, en cette période critique de propagation du virus, il est recommandé, à titre curatif, de prendre des vitamines comme le zinc et la vitamine C pour booster l’immunité, mais à des doses bien limitées. Par ailleurs, et à l’instar des professionnels de la santé en Algérie, le Pr Mekacher appelle à interdire «complètement» l’importation des compléments alimentaires, surtout quand on sait que beaucoup de produits interdits dans leurs pays d’origine rentrent au pays et peuvent avoir ainsi des conséquences fâcheuses sur la santé des consommateurs. Il a appelé à l’encadrement et à la règlementation de la production locale des compléments alimentaires ainsi qu’à leur commercialisation.