Assia Djebar: Son immense talent d’écrivain a porté l’algérianité à l’universel
Son décès a été confirmé par le Cercle des amis de Assia Djebar. C’est une nouvelle qui nous attriste profondément. Assia Djebar était l’image sublime de la femme algérienne capable de se dépasser par ses remarquables facultés intellectuelles et créer
des miracles.
Le nom d’Assia Djebar a surgi à la fin des années cinquante en pleine guerre de libération nationale. C’était un nom inconnu devenu soudainement célèbre grâce à la parution du premier livre, un roman qui a tout de suite été admis dans le monde de la littérature d’expression française, un monde hermétiquement fermé pour les Algériens.
L’exemple de cette exclusion de nos écrivains algériens est donné par les immenses obstacles rencontrés par Mouloud Feraoun pour trouver une maison d’édition à son livre, le Fils du pauvre.
C’était la surprise pour les milieux colonialistes de l’époque de constater la réussite de cette auteure qui est de surcroit une femme issue de la population indigène. C’était pour eux une anomalie de la nature. Et pourtant, le talent raffiné et le style élevé d’écrivain de Assia Djebar étaient incontestables. Il fallait d’ailleurs un art hors du commun dans l’écriture pour pouvoir émerger.
C’était l’époque d’Albert Camus, récipiendaire du prix Nobel de littérature. Quelle classe pour Assia Djebar, elle qui était encore si jeune, de pouvoir se mesurer avec cet écrivain né en Algérie, devenu célèbre aux quatre coins du monde ! Ainsi, les débuts de Assia Djebar ont fait sensation. Cette notoriété et cette gloire sont restées sans taches en accompagnant cette femme de lettres tout au long de sa brillante carrière littéraire.
Ses nouvelles parutions étaient toujours attendues par le monde de la littérature, avec à chaque fois un succès retentissant. Son immense talent lui a fait décerner de prestigieuses distinctions et lui a permis d’atteindre de hautes fonctions dans les hiérarchies de la littérature. Assia Djebar était même pressentie pour le prix Nobel de littérature.
Son nom avait circulé ces dernières années parmi les éventuels lauréats de ce prix. Ce couronnement, Assia Djebar aurait pu en bénéficier si la vie ne l’avait pas quittée subitement. Cela aurait été pour l’Algérie un grand motif de fierté glorifiant la femme algérienne. Assia Djebar est pour nous déjà un motif de grande fierté. Cette enfant de Cherchell a su porter l’algérianité à l’universel. Grâce à elle, la femme algérienne existe et possède sa place dans le monde.
Assia Djebar est restée attachée à ses racines. Elle aurait pu emprunter un autre nom pour signer ses œuvres. Non, elle a gardé le nom de ses ancêtres algériens, le faisant connaître aux horizons lointains et en même temps à d’autres peuples et continents. Assia Djebar a fait aussi connaître universellement nos coutumes, nos traditions, notre histoire. Si elle n’est plus de ce monde, son nom est maintenant gravé pour toujours dans les pages glorieuses de l’évolution de notre société algérienne.