Hausse des prix: Appel au boycott des œufs
« N’achetez pas les œufs! », tel est le hashtag de la campagne lancée en ce début d’année par les internautes algériens contre la flambée du prix des œufs. Une campagne timide car les ménages savent que ce produit est devenu indispensable dans les foyers algériens et que, souvent, il se substitue à tout un repas. Mais pourquoi cette hausse vertigineuse ? Les citoyens vont-ils vraiment suivre cette campagne de boycott ?
Pour les ménages algériens, c’est un autre casse-tête pour leurs bourses. La gestion du budget familial étant déjà assez compliquée en raison de l’inflation des produits alimentaires de base, voilà qu’ils font face à l’augmentation d’un autre aliment aussi indispensable. Depuis des mois, le prix de l’œuf sur les marchés connaît une augmentation significative. Une unité se vend désormais entre 20 et 25 DA, contre 15 DA il y a quelques mois. Un plateau de 30 œufs est cédé à pas moins de 600 DA, et ce contrairement aux années précédentes où le prix des œufs connaissait une certaine baisse atteignant les 10 DA l’unité et 250 DA le plateau. Dans certaines villes, le plateau est cédé à 650 DA.
Les aviculteurs attribuent la flambée du prix des œufs au fait que le coût de l’aliment pour volaille a considérablement augmenté. Ils avancent aussi d’autres facteurs, à savoir la baisse du nombre de poules pondeuses, le problème de la grippe aviaire et ses conséquences immédiates sur l’élevage ainsi que les contraintes sanitaires.
Cependant, ces arguments n’ont pas convaincu les citoyens et les associations de protection des consommateurs. Ainsi, sur les réseaux sociaux, en particulier Facebook, plusieurs pages ont partagé le hashtag « N’achetez pas les œufs » et ont appelé les citoyens à boycotter ce produit jusqu’au retour des prix à la normale.
Il faut admettre que plusieurs campagnes de ce genre ont été lancées mais elles n’ont malheureusement pas abouti et la hausse des prix perdure toujours. « Les Algériens ne font rien pour que cela cesse. Même si l’œuf se vend à 50 DA l’unité, ils achèteront toujours. Nous n’avons pas encore la culture du boycott et tant que cela durera, les choses ne changeront pas », a regretté Kamel, père de famille. « Acheter des œufs à 22 DA l’unité n’est vraiment pas normal. Son prix ne devrait pas dépasser les 10 DA. Les autorités concernées doivent intervenir et mettre fin à ces spéculations qui ne font qu’affaiblir davantage le pouvoir d’achat de citoyen », a-t-il poursuivi.
De son côté, Zineb, pâtissière, a confié : « Ma profession ne me permet pas de boycotter les œufs. Même si je trouve que ce prix est excessif, je ne peux pas faire autrement. Tout ce que je souhaite, c’est que les autorités concernées effectuent des contrôles rigoureux afin que les prix soient à la portée du simple citoyen. »
« Jamais ce produit n’a atteint un seuil pareil ! Même avec la flambée du prix du poulet, celui des œufs n’a jamais suivi, il est toujours demeuré stable. Alors que s’est-il passé ? », s’est interrogé Youcef, appelant les citoyens à boycotter ce produit. « On ne va pas mourir si l’on ne mange pas d’œufs. Il faut les laisser pourrir chez les commerçants », a-t-il suggéré.
L’Organisation algérienne de protection et d’orientation du consommateur et son environnement (APOCE) ne cesse d’inciter les consommateurs à boycotter tout produit dont les prix connaissent une hausse excessive. Cette fois-ci, et à travers un post sur sa page Facebook officielle, l’organisation de Zebdi a exprimé son soutien total à cette campagne. « L’APOCE annonce son soutien total aux campagnes de boycott que certaines personnes ont lancées sur les réseaux sociaux », lit-on dans le post, ajoutant que « le boycott est l’arme du consommateur pour changer la réalité et dénoncer les situations qui portent préjudice à son pouvoir d’achat ».
Le président de l’APOCE, qui qualifie cette hausse vertigineuse de phénomène « très inquiétant », regrette le fait qu’aucune mesure à même de garantir la disponibilité et la stabilité des prix du produit n’est en vue. Mustapha Zebdi a lancé un appel aux acteurs de la filière avicole à « trouver des solutions dans les plus brefs délais » car le mois de ramadhan, période durant laquelle la demande pour les œufs s’accroît, approche à grands pas.
Les aviculteurs, pour leur part, justifient cette hausse par deux principales raisons. Il s’agit de la flambée du prix de l’aliment pour les poules et le manque de production en raison de la chute du nombre de poules pondeuses. Selon la Fédération nationale, le coût de l’aliment pour volaille a quasiment doublé sur le marché international ces dernières semaines. Une hausse qui a fait que le prix du plateau d’œufs sur le marché de gros atteint les 570 DA.
En effet, selon le porte-parole de la Fédération, les prix des différents types d’aliments pour volaille sont passés de 3 500 dinars le quintal en 2021 à 7 500 DA, voire 8 000 dinars le quintal dernièrement. Ce qui a porté un sérieux préjudice aux éleveurs et a contraint les plus petits d’entre eux à cesser leur activité. Pour ce qui est des poules pondeuses, leur nombre a chuté de près de 40 millions en 2019 à environ 8 millions actuellement.
A cela s’ajoutent les maladies, en particulier la grippe aviaire, qui nécessitent l’imposition d’un vide sanitaire pouvant aller jusqu’à six mois. Le porte-parole de la Fédération des aviculteurs a tenu à rassurer les citoyens quant au fait que les prix des œufs allaient baisser avec l’avènement du mois de ramadhan à 15 DA ou 17 DA l’unité. Il a précisé que les poules pondeuses que les éleveurs installent actuellement dans les poulaillers entreront en production dans environ 4 mois. Cela garantira, selon lui, la disponibilité des œufs en quantité suffisante pour ramener les prix à un seuil raisonnable.