Ali Bey Nasri : «La réglementation des changes, principal verrou»
Fixé comme objectif pour 2021, la bataille des 5 milliards de dollars d’exportations hors hydrocarbures sera difficile à atteindre. Les obstacles à l’exportation demeurent toujours et l’encouragement des exportations, exprimé notamment par le président de la République, n’est pas traduit sur le terrain.
Et c’est la réglementation des changes qui constitue le principal verrou à l’exportation, selon les affirmations de Ali Bey Nasri, président de l’Association nationale des exportateurs algériens (Anexal), lequel pointe du doigt la Banque d’Algérie.
Lors de son passage, ce dimanche sur les ondes de la Chaîne 3, il a affirmé que «ce verrou à l’exportation est cité de manière unanime par les exportateurs», signalant les efforts déployés par le ministère du Commerce pour ce qui est de la vulgarisation de l’acte d’exportation. Cela ne suffit cependant pas, d’autant que rien n’est fait concrètement pour accompagner les exportateurs. «Nous sommes toujours au point mort concernant la réglementation de change.
Nous sommes encore au stade zéro», a-t-il précisé, notant que la réglementation n’est pas en adéquation et n’encourage pas les exportations. Selon le président de l’Anexal, qui est membre du comité de pilotage de la stratégie nationale des exportations, le discours du président de la République le 18 août 2020, lors de la présentation du plan de relance économique, est resté lettre morte, d’autant, a-t-il expliqué, que les instructions qu’il avait données ne sont pas appliquées sur le terrain.
L’intervenant estime que la réglementation des changes demeure le principal frein à l’exportation : «Une loi qui date de 2007 et qui n’est pas en phase avec ce qui devrait être fait pour encourager les exportations.» Il a souligné la transmission de toutes les doléances au niveau de la réglementation des changes et a affirmé que ces dernières n’ont pas été prises en charge. «Malheureusement, nous avons eu des échos extrêmement défavorables», a indiqué le premier responsable de l’Anexal, qui appelle encore une fois à la levée de ces entraves.
Il est donc question, a-t-il préconisé, de lever l’interdiction faite aux entreprises algériennes d’établir des représentations à l’étranger. «Il faudrait lever le règlement 14/04 (fixant les conditions de transfert de capitaux à l’étranger au titre de l’investissement à l’étranger par les opérateurs économiques de droit algérien).
Il faut qu’on comprenne définitivement que l’internationalisation d’une entreprise algérienne est un levier de croissance pour l’économie du pays», a-t-il expliqué, signalant le fait que tous les pays du monde cherchent à investir à l’étranger.
«Jusqu’à quand allons-nous interdire aux entreprises algériennes, qui ont atteint un certain stade de maturité, d’investir à l’étranger ?», s’est interrogé l’expert, lequel estime que l’argument de la Banque d’Algérie, qui met en avant la baisse des réserves de change, ne tient pas la route. «Nous avons demandé à ce que les opérateurs utilisent le compte devises de l’entreprise, pourquoi ne le fait-on pas ?», s’est-il interrogé, soulignant la nécessité d’inscrire le développement des exportations dans les missions de la Banque d’Algérie.
«Il ne suffit pas de constater la fonte des réserves de change, il faut trouver des leviers pour engranger les recettes», a-t-il dit. Selon Ali Bey Nasri, il est également nécessaire de procéder à la dépénalisation de l’acte d’exporter, affirmant avoir demandé un amendement de l’ordonnance 96/22 qui criminalise une insuffisance de rapatriement des devises.
«Sur les 1 200 exportateurs recensés, 1 150 font leurs premiers pas», a rappelé le président de l’Anexal, qui juge injustifié de maintenir la menace d’une accusation en pénal qui assimile le risque de non-rapatriement des recettes d’exportation à une fuite de capitaux. Il propose ainsi d’extraire des poursuites judiciaires les exportateurs assurés auprès de la Compagnie algérienne d’assurance et de garantie des exportateurs (CAGEX).
L’intervenant a par ailleurs évoqué les coûts élevés du fret assuré exclusivement par des armateurs étrangers. Les coûts se sont multipliés par trois, selon ses précisions, en raison de la pandémie du coronavirus, qui a déstabilisé le fret maritime. «Ne peut-on pas mettre 2 ou 3 milliards de dollars pour l’achat des navires qui nous manquent, notamment les céréaliers, au lieu de perdre chaque année 5 à 6 milliards de dollars de fret ?», s’est-il interrogé.