Affaire Chani-Boukhari : Ouverture du procès dimanche prochain

Les juges de la 6e chambre pénale près la cour d’appel d’Alger se pencheront dimanche prochain sur l’affaire qui revient,
après cassation, de Chani Medjdoub, l’ex-conseiller du P-DG d’Algérie Télécom, et Mohamed Boukhari.
Le procès, qui devait se dérouler le 9 juin dernier devant la présidente Meriem Derrar Djebbari, a été reporté à la demande des avocats de la défense. Ces derniers ont insisté, au cours de leur intervention, pour obtenir un autre délai, et ce dans le but de bien préparer leurs plaidoiries et, par-delà, obtenir un bon jugement.
Pour rappel, les deux mis en cause ont été condamnés en 2012 à des peines de 15 ans de prison, assortis de 4 millions de dinars.
Ils ont été blanchis par le président en charge du dossier du chef d’accusation de trafic d’influence, mais celui-ci a néanmoins retenu contre eux l’accusation relative au blanchiment d’argent.
Les deux sociétés chinoises ZTE Algérie et Huawei Algérie ont écopé d’une mesure d’interdiction d’investir en Algérie pendant une durée de deux ans et ont été condamnées à payer, chacune, un million de dinars d’amende, et ce pour versement de pots-de-vin.
Les deux mis en cause ont vu leurs peines relativement allégées par rapport au verdict du procès en première instance, durant lequel Chani et Boukhari avaient été condamnés à 18 ans de prison et à une amende de 5 millions de dinars chacun pour corruption au détriment d’Algérie Télécom.
Le tribunal de Sidi M’hamed avait également décidé de saisir les biens de Mohamed Boukhari au Luxembourg ainsi que ses comptes bancaires. Trois cadres des sociétés chinoises ZTE Algérie et Huawei Algérie avaient été, en outre, condamnés à dix ans de prison ferme par défaut pour trafic d’influence et versement de pots-de-vin. Des mandats d’arrêt internationaux ont été lancés à leur encontre.
Le procureur général près la cour d’appel d’Alger avait requis, au cours de son réquisitoire, 18 ans de prison ferme assortis d’une amende de 4 millions de dinars à l’encontre de l’ancien conseiller du P-DG d’Algérie Télécom, Mohamed Boukhari, et de l’homme d’affaires algéro-luxembourgeois, Chani Medjdoub.
Le même procureur avait requis, dans la même affaire, les mêmes peines prononcées lors du premier jugement, à savoir 10 ans de prison ferme contre les deux autres accusés, à savoir les deux sociétés chinoises.
Ainsi, le représentant du parquet général a requis la confirmation des premières sentences par les juges de la même cour, autrement composée. Les deux mis en cause sont poursuivis pour corruption et blanchiment d’argent.
Il avait été demandé que les premières peines prononcées à l’encontre des deux sociétés chinoises, ZTE Algérie et Huawei Algérie, lors du premier jugement soient confirmées.
Pour rappel, Mohamed Boukhari et Chani Medjdoub ont été condamnés en juillet 2012 en première instance judiciaire, après que le juge du pôle judiciaire spécialisé du tribunal de Sidi M’hamed les a reconnus coupables des faits qui leur ont été reprochés tout au long de l’instruction judiciaire menée par le juge de la 9e chambre d’instruction du tribunal d’Alger.
Ils ont ainsi écopé chacun de 18 ans de prison. Cette peine a été commuée en décembre de la même année à 15 ans de prison par la cour d’appel d’Alger. Les deux sociétés ZTE Algérie et Huawei Algérie avaient été, elles aussi, condamnées à une année d’interdiction de soumission aux marchés publics.
L’affaire avait éclaté à la suite d’une commission rogatoire transmise à Luxembourg dans le cadre du dossier de l’autoroute Est-Ouest. Celle-ci avait mis au jour des informations concernant des pots-de-vin versés par deux sociétés chinoises aux deux prévenus.
Le pôle judiciaire spécialisé d’Alger avait aussitôt ouvert une enquête sur ordre du parquet général de la cour d’Alger. Les deux mis en cause qui se sont succédé à l’audition ont nié tous les faits qui leur étaient reprochés. Chani Medjdoub a comparu, rappelons-le, devant les juges sur une chaise roulante. Il a clamé haut et fort :
« La banque Natixis est entièrement responsable dans cette affaire pour la simple raison qu’elle a utilisé, avec la complicité de Mohamed Boukhari, des moyens fallacieux pour transférer des sommes colossales en euros. »
Quant au premier inculpé dans cette affaire, Mohamed Boukhari, il a déclaré avoir agi conformément à la loi, même en ce qui concerne la somme de 4 millions d’euros transférée sur son compte bancaire. Le procès a été reporté à plusieurs reprises en raison, notamment, de l’absence des témoins ainsi que des deux inculpés, Mohamed Boukhari et Chani Medjdoub, en détention, lesquels n’ont pas été transférés à Alger pour être rejugés.
Dong Tao, Chen Zhibo et Xiao Chuhfa, toujours en fuite, font l’objet d’un mandat d’arrêt international. Cela dit, le fait marquant du procès en appel reste incontestablement les graves accusations portées à l’encontre de la banque Natixis.
Cette dernière, selon la défense, a joué un rôle trouble dans cette affaire. L’autre fait ayant marqué le procès en appel porte sur les propos tenus par l’un des mis en cause dans cette affaire lors de son passage à la barre.
En effet, Mohamed Boukhari, qui avait reconnu devant le juge avoir effectivement perçu de l’argent dans le cadre de transactions commerciales conclues par Algérie Télécom avec les deux sociétés chinoises, ZTE Algérie et Huawei Algérie, avait déclaré : « J’étais à l’époque chargé de la communication et donc, je n’avais pas le pouvoir d’influer sur le processus d’attribution de marchés. Au début, j’ai catégoriquement refusé de percevoir de l’argent, puis j’ai fini par accepter, l’argent ne provenant pas des caisses d’Algérie Télécom ou de toute autre institution publique. »
Chani est également poursuivi dans l’affaire de l’autoroute Est-Ouest, dans laquelle il est accusé, à côté de 22 personnes morales et physiques, de corruption et de blanchiment d’argent. Les deux inculpés ont nié tous les faits qui leur étaient reprochés, estimant avoir agi conformément à la loi relative à la conclusion des marchés publics.
Les avocats de la défense qui se sont succédé pour les plaidoiries ont insisté sur « la nullité des procédures de poursuite judiciaire et sur la prescription de l’action publique », estimant que les faits remontent à 2003 alors que l’ouverture de l’instruction judiciaire ne s’est faite qu’en 2008.
Il convient de signaler que le procureur général avait estimé qu’il n’y avait pas prescription de l’action publique pour la simple raison que, dans cette affaire, il existe toujours des infractions répétées.
Il faut savoir que cette affaire a éclaté à l’occasion de l’instruction entamée dans le cadre du dossier de l’autoroute Est-Ouest suite à une commission rogatoire internationale ayant conduit l’ex-juge d’instruction de la 9e chambre près du pôle judiciaire de Sidi M’hamed, Kamel Ghazali – il occupe actuellement le poste de procureur général adjoint près la cour de Blida – au Luxembourg.
Selon le dossier judiciaire, Mohamed Boukhari, ancien cadre dirigeant d’Algérie Télécom, et l’homme d’affaires Chani Medjdoub auraient perçu des pots-de-vin pour avoir facilité la conclusion de transactions douteuses, en matière de télécom-communications et internet, entre Algérie Télécom et les deux sociétés chinoises, ZTE Algérie et Huawei Algérie.
Plus précisément, les deux sociétés chinoises en question auraient versé, en contrepartie de ces transactions avec Algérie Télécom, des « commissions » au profit de deux sociétés de consulting appartenant à Boukhari et Chani dans des comptes offshore ouverts au Luxembourg.
Au cœur de ce scandale, la filiale luxembourgeoise d’une banque française : Natixis Private Banking. C’est à travers cet établissement financier que les commissions, qui seraient en fait des rétro-commissions, ont été effectuées sur le compte personnel de Boukhari.
Ce dernier avait reconnu devant le juge avoir perçu dix millions de dollars en contrepartie d’un travail de consulting, niant avoir eu une quelconque influence dans la conclusion des marchés entre les sociétés incriminées.
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