La nationalité française sauve Ould Kaddour à Abu Dhabi
Grâce à la nationalité française, l’ancien PDG de Sonatrach, Abdelmoumen Ould Kaddour n’a pas été interpellé ou placé en détention par les autorités émiraties le 20 mars dernier sur la base de la notice rouge d’Interpol (mandat d’arrêt international) émise contre lui par l’Algérie comme annoncé par plusieurs médias. C’est ce qu’a affirmé ce samedi 27 mars au Jeune Indépendant une source officielle émiratie.
« M. Ould Kaddour qui a été l’hôte de notre pays à Abu Dhabi n’a pas fait l’objet d’une quelconque interpellation ou convocation officielle par nos instances aéroportuaires ou sécuritaires », a déclaré ce responsable émirati sous couvert d’anonymat joint par téléphone.
Ould Kaddour qui fait l’objet d’un mandat d’arrêt international séjournait à Abu Dhabi du 19 au 23 mars a ajouté la même source , sans préciser les motifs et les conditions de son séjour dans la capitale émiratie.
Plusieurs médias avaient rapporté que l’ancien PDG de Sonatrach, avait été arrêté le 20 mars dernier à l’aéroport international de Dubaï en provenance de Paris alors qu’il se dirigeait à Muscat au sultanat d’Oman.
Le responsable émirati a aussi précisé qu’aucun voyageur ne pouvait faire l’objet d’une interpellation dans la zone de transit de l’aéroport de Dubaï sauf dans le cas où il passe par des ports de sortie ou d’entrée.
Interrogé si Ould Kaddour avait séjourné à Abu Dhabi avec un passeport français, le responsable émirati s’est contenté d’affirmer que les ressortissants algériens sont soumis à des visas d’entrée électroniques délivrés via des agences accrédités ou sur place dans certains cas notamment pour les ressortissants algériens résidants dans les pays du Golfe. Les détenteurs de la nationalité française ne sont pas soumis à des visas, a-t-il rappelé.
Selon des sources sécuritaires algériennes, le mandat d’arrêt international lancé, au début du mois de mars dernier, contre Ould Kaddour indique qu’il est de nationalité algérienne ce qui a vraisemblablement empêché son arrestation s’il a utilisé un passeport français. Ould Kaddour est détenteur de la nationalité française au même titre que son fils et son épouse. Son fils Nacim est également détenteur de la nationalité américaine obtenue par le droit du sol compte tenu du fait qu’il est né à Boston (Massachussetts) .
Une autre source émiratie a précisé au Jeune Indépendant que l’identification des personnes dans les pays du Golf exige la mention du prénom du père accompagnant le prénom de Ould Kaddour, ce qui a aussi donné lieu à un véritable quiproquo s’agissant de l’identité mentionnée dans le mandat d’arrêt émis par Alger. La même source a fait savoir également qu’Ould Kaddour « n’a pas payé de caution pour sa libération car la loi émiratie n’autorise pas la justice à accepter des cautions dans le cas des mandats d’arrêt internationaux mais plutôt de soumettre le mis en cause, si nécessaire, à un contrôle judiciaire en attendant un complément d’enquête ».
La partie algérienne devrait rectifier, indique-t-on de même source, les éléments fournis dans la notice rouge d’Interpol qui contient une photographie, des empreintes digitales et les références des passeports ou autres pièces d’identité de la personne recherchée et transmises par la direction d’Interpol à Lyon à tous les pays. Cette notice qui est diffusée en quatre langues (français, anglais, espagnol et arabe) permet de localiser un fugitif en vue de son éventuelle arrestation. Dans les pays ayant signé un accord d’extradition avec l’Algérie, le fugitif est placé en détention provisoire.
Pour rappel, un mandat d’arrêt international contre l’ancien du groupe Sonatrach Abdelmoumen Ould Kaddour principal accusé dans l’affaire de l’acquisition de la raffinerie Augusta a été lancé le mois dernier.
Le Pôle pénal économique et financier avait ouvert une enquête sur l’affaire de la raffinerie d’Augusta, dans laquelle un mandat d’arrêt international a été émis contre l’ancien PDG de Sonatrach comme principal accusé.
L’acquisition par le groupe Sonatrach en 2018, pour un montant de plus de 700 millions de dollars, de la raffinerie d’Augusta en Sicile (Italie) a fait couler beaucoup d’encre. La transaction a en effet suscité une grande polémique, notamment concernant le montant déboursé pour l’acquisition d’une raffinerie vieille de sept décennies et pour laquelle ExxonMobil avait, en vain, cherché un acheteur depuis 2015, selon les spécialistes. La présentant comme une opportunité et « une bonne affaire », il a été surtout mis en avant le fait que la raffinerie allait traiter le brut algérien, comblant ainsi le déficit national en produits raffinés que le pays importait.
L’argument n’a pas tenu la route longtemps, d’autant que la raffinerie était conçue pour des bruts de densités moyenne et lourde et non pour du brut léger de la catégorie de ceux que produit l’Algérie. Il faut donc acheter du brut chez un fournisseur tiers pour le raffiner. Des experts avaient alors émis des réserves et se sont opposés à cette transaction, exhortant même le gouvernement de l’époque de ne pas approuver la transaction, compte tenu du montant exorbitant auquel devait s’ajouter des sommes importantes à engager dans le cadre de sa mise en conformité avec les normes environnementales. Mais ce fut peine perdue car la transaction a finalement eu lieu.
Pour situer les responsabilités dans l’acquisition par Sonatrach de la raffinerie d’Augusta, qualifiée de fiasco, la justice a ouvert le dossier en juillet 2020 et a placé sous mandat de dépôt un conseiller de Abdelmoumen Ould Kaddour, l’ancien P-DG du groupe pétrolier, actuellement à l’étranger, ainsi que Ahmed Mazighi, qui est poursuivi pour dilapidation de l’argent public et abus de fonctions.
Au mois de janvier dernier, la justice a encore convoqué d’autres responsables de Sonatrach, supposés être impliqués dans cette transaction.
Au moins une dizaine de responsables de Sonatrach, dont d’anciens membres de conseil d’administration, ont été convoqués, en janvier dernier, devant le juge d’instruction près du tribunal de Bir Mourad Raïs, à Alger, dans le cadre de l’enquête sur la transaction ayant conduit à l’acquisition de la raffinerie d’Augusta en 2018.
Une source chargée du dossier avait confié au Jeune Indépendant que les responsables convoqués étaient notamment les anciens membres de l’ex-conseil d’administration du groupe pétrolier ainsi que les dirigeants clefs dans le processus d’achat de la vieille raffinerie d’ExxonMobil.